Des facteurs-clés contribuent au succès des programmes

Les taux élevés de grossesse accidentelle et de maladies sexuellement transmissibles enregistrés chez les jeunes adultes reflètent la nécessité urgente qui s'impose de mettre à la disposition des adolescents des services de santé reproductive plus efficaces. Mais par quels moyens peut-on assurer la réussite d'un programme quelconque ?

Les experts internationaux sont d'accord sur plusieurs éléments-clés qui contribuent au succès des services de santé reproductive pour la jeunesse. Identifier et comprendre le groupe auquel ils sont destinés, faire participer les jeunes à la conception des programmes, obtenir la coopération des dirigeants communautaires et des parents, et trouver de meilleurs moyens d'assurer l'accessibilité à ces services sont généralement considérées comme des éléments importants. L'évaluation des programmes devrait être incorporée dans leur conception et les responsables devraient prévoir des moyens d'assurer la permanence et l'expansion des services qui ont fait leurs preuves.

"Nous continuons à nous poser un grand nombre de questions mais nous ne pouvons pas attendre, pour agir, d'avoir des réponses définitives", déclare le docteur Herbert Friedman, ancien directeur du Programme de la santé et du développement des adolescents à l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). "La situation des jeunes est urgente. Nous avons besoin d'une meilleure évaluation de l'efficacité des programmes et de mesures d'intervention plus efficaces mais nous en savons suffisamment pour passer à l'action. Nous devons cependant faire des efforts concertés pour améliorer la qualité des programmes et étendre leur portée. Nous tentons d'égaler la volonté croissante des gouvernements de servir la jeunesse."

L'OMS coordonne, avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), une étude des principales interventions conçues pour améliorer les services de santé destinés aux adolescents, mettant l'accent sur l'efficacité de ces efforts.

L'un des principaux facteurs dont il faut absolument tenir compte dans la planification de tout service destiné aux jeunes adultes est la psychologie de ces jeunes. Les adolescents manquent généralement d'information sur les questions sexuelles ainsi que d'expérience et de confiance dans ce domaine. "Ils sont souvent plus vulnérables que les autres groupes d'âge", explique le docteur Cindy Waszak, de FHI, spécialiste de la santé reproductive des adolescents. "De plus, ajoute-t-elle, les prestataires ont tendance à porter des jugements catégoriques sur les jeunes et ces derniers se heurtent à davantage de barrières juridiques et culturelles."

Les facteurs qui interviennent dans l'amélioration de l'accessibilité aux services sont l'attitude et la formation des prestataires, la logistique en ce qui concerne le lieu et les services du dispensaire, les questions de vie privée et de confidentialité et d'autres éléments se rapportant aux besoins particuliers des jeunes adultes. "Les jeunes ont besoin de défenseurs. Les prestataires doivent recevoir une formation spéciale pour servir la jeunesse", affirme le docteur Waszak.

Le groupe visé par les services

Les programmes couronnés de succès identifient généralement un groupe cible auquel ils sont destinés, souvent en fonction de l'âge, de la situation scolaire et matrimoniale de ses membres et d'autres facteurs sociaux. Ces données permettent d'analyser les besoins du groupe cible et de mettre au point la stratégie qui permettra de satisfaire ses besoins. "Il est important d'éviter de traiter les adolescents comme un groupe homogène", explique Mme Judith Senderowitz, conseillère indépendante qui analyse les programmes pour la jeunesse de FOCUS on Young Adults, basé aux Etats-Unis, ainsi que ceux du FNUAP et d'autres organisations. "Mettre l'accent sur la condition particulière des jeunes est extrêmement important, principalement leur situation matrimoniale, leur scolarisation et leur situation géographique." Par exemple, explique-t-elle, les besoins des jeunes citadins sont généralement très différents de ceux des adolescents des zones rurales, de même que les ressources à leur disposition.

Dans une récente évaluation de 70 projets axés sur les adolescents, le FNUAP a découvert que presque aucun d'entre eux n'avait défini clairement le groupe cible ni incorporé dans la conception des programmes une évaluation des besoins.1 "Les planificateurs des programmes ne précisaient pas toujours clairement le groupe d'âge qu'ils avaient l'intention de servir", déclare Mme Senderowitz, qui a rédigé l'évaluation du FNUAP. "Dans certains cas, ils avaient choisi la voie la moins onéreuse, comme les programmes scolaires, alors que les jeunes qui ont le plus besoin de ces services et qui sont les moins bien servis ne sont pas scolarisés."

Tenir compte de la situation matrimoniale des intéressés peut être particulièrement important. Qu'ils soient mariés ou pas, les jeunes ont des problèmes biologiques et de développement communs sur le plan de la santé reproductive. C'est pourquoi les besoins de renseignements sur la sexualité, les contraceptifs, la grossesse et autres problèmes sont les mêmes pour tous. Qu'ils soient mariés ou célibataires, les jeunes adultes sont exposés à des risques découlant de la grossesse et des maladies sexuellement transmissibles (MST). Mais les jeunes célibataires se heurtent souvent à davantage d'obstacles aux services et ils ont des besoins différents en matière de contraception.

"Quand on conçoit un programme à l'intention d'un groupe particulier, il est indispensable d'utiliser des objectifs précis et mesurables, déclare le docteur Waszak, de FHI. Trop souvent, les objectifs d'un projet manquent de précision. Si bien que nous n'avons aucun moyen de juger si une approche est efficace."

La participation des jeunes

Les experts pensent que les prestataires devraient faire participer les jeunes à la planification et à la mise en oeuvre des services de santé reproductive ainsi qu'à l'évaluation des programmes. Cependant, très peu de recherches ont été faites pour préciser la façon dont on peut utiliser cette participation pour obtenir des résultats positifs. "La participation des jeunes est maintenant à la mode", déclare le docteur Ann McCauley, conseillère de FOCUS pour la diffusion de documentation. "L'efficacité de cette approche pour modifier les comportements des jeunes n'a pas été prouvée. Je suis favorable à ce concept et je le soutiens, mais nous devons en savoir beaucoup plus sur ce qui est faisable et sur la meilleure façon d'inclure les jeunes."

Les prestataires peuvent faire participer les jeunes à bien des étapes d'un projet, de l'évaluation initiale des besoins et de la conception d'un programme à son exécution, et même à la formation des prestataires. "Il est important de travailler avec les jeunes dans des groupes de discussions dirigées et des ateliers afin d'identifier les principaux problèmes ou contraintes auxquels ils se heurtent pour obtenir des renseignements et des services de santé reproductive", explique le docteur Fritz Moïse, directeur de la Fondation de Santé Reproductive et d'Education Familiale (FOSREF) d'Haïti, qui fournit des services de santé reproductive et se concentre sur la jeunesse.

En février, le docteur Moïse a aidé à diriger un programme de formation de prestataires sur l'accès des jeunes aux services de santé reproductive à Dakar, au Sénégal. A cet atelier, qui était organisé par FHI, participaient des prestataires et de jeunes adultes. Les jeunes y ont pris part à des jeux de rôle, à des séances pratiques de counseling et à des discussions générales. Dans leur évaluation de l'atelier, plusieurs participants ont mentionné l'importance de la participation de la jeunesse. "Les adolescents nous ont beaucoup appris. Leur participation a rendu l'atelier plus fructueux", a écrit l'un des participants, un prestataire. "J'ai beaucoup apprécié la participation des jeunes adultes. Le fait de pouvoir leur poser des questions s'est révélé très utile", a dit un autre. "Amener les jeunes à parler ouvertement de leurs problèmes permettra d'améliorer les services", a affirmé un troisième participant.

De nombreux programmes ont recours à de jeunes adultes qui travaillent directement avec d'autres adolescents. Ces jeunes, appelés pairs-éducateurs, sont utilisés efficacement dans les programmes de prévention du sida. Le projet AIDSCAP de prévention et de lutte contre le sida de FHI a récemment étudié 21 projets d'éducation par les pairs mis en oeuvre en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Cette étude a conclu que l'éducation par les pairs est un moyen utile de se procurer des informations sur le VIH/sida. "Les pairs-éducateurs s'expriment franchement. Ils vont droit au but, sans préjugés", a déclaré un jeune Brésilien interviewé dans le cadre de cette étude. "Ils me comprennent et saisissent facilement mes problèmes dans ce domaine", a dit de son côté un jeune Camerounais. Cependant, le rapport a montré que les programmes devraient probablement faire davantage. "Les planificateurs doivent se demander si leurs projets ont besoin d'évoluer et de quelle façon", conclut le rapport. "Si leurs pairs sont déjà bien informés sur les infections par MST ou VIH, les pairs-éducateurs devraient aborder la question des compétences et attitudes nécessaires pour effectuer et maintenir des changements de comportement.2

Se basant sur cette étude, AIDSCAP a publié un guide pour la mise au point de projets d'éducation par les pairs qui utilise une approche à la fois pratique et empirique. Ainsi, un chapitre intitulé "Devrais-je utiliser une approche d'éducation des pairs ?" contient un formulaire comportant notamment les questions suivantes : Quels sont les buts de ce projet ? Quel est le public cible ? Combien de membres de l'équipe seront nécessaires pour aider à encadrer et à former un nombre suffisant de pairs-éducateurs ? Mon budget comprend-il les frais d'encadrement ?3

FOCUS a identifié onze éléments de programmes d'éducation par les pairs qui ont été couronnés de succès, y compris la sélection et la formation des pair-éducateurs, l'acquisition de compétences, la fourniture d'informations et l'orientation ainsi que la découverte de moyens pour limiter le plus possible le renouvellement des pairs- éducateurs. Chaque fois que cela est possible, les jeunes devraient participer à la mise au point du matériel d'enseignement, y compris sa conception, les types de langage utilisés et les expériences sur le terrain, selon les circonstances locales.


Network, Printemps 1997, Volume 17, Numéro 3 .
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© Copyright 1999, Family Health International (FHI)



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