France Biotech recommande que les inventions soutenues par la recherche publique française soient valorisées au sein de l'Union Européenne.

France Biotech,  l'association des Entrepreneurs des Sciences de la Vie s'interroge sur le Projet de loi relatif à l'Enseignement supérieur et à la recherche : les inventions soutenues par la recherche publique française devraient être valorisées au sein de l'Union Européenne... lorsque c'est possible !

L'article 55 du projet de loi No 835 du 20 mars 2013 relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche, s'il devait être adopté en l'état, aurait un impact significatif (I) sur les activités de valorisation et les missions de service public des personnes publiques ainsi que (II) sur le développement et l'activité des entreprises des secteurs pharmaceutique et biotechnologique développant ou exploitant des inventions issues de la recherche publique française.

 

Le projet de loi propose :

 

- d'étendre la disposition de l'article L. 329-7 à tout projet de recherche financé sur dotations de l'Etat et des collectivités territoriales ou par subventions d'agences de financement nationales,

- et surtout, de la renforcer en obligeant les personnes publiques concernées à valoriser l'invention auprès d'entreprises « qui s'engagent à une exploitation de l'invention sous la forme d'une production industrielle ou de la création de services sur le territoire de l'Union Européenne et parmi ces entreprises, prioritairement auprès de celles employant moins de deux cent cinquante salariés ».

 

Au-delà de l'incitation, l'obligation pour les établissements publics d'imposer à leurs partenaires licenciés que ceux-ci s'engagent à une production industrielle de l'invention ou à la création de services sur le territoire de l'Union Européenne, pourrait avoir des effets contraires au but poursuivi de créer de la valeur économique sur le territoire de l'Union Européenne.

 

 

I. Impact sur les activités de valorisation et les missions de service public des personnes publiques

 

L'obligation de valoriser auprès d'entreprises qui s'engagent à une exploitation de l'invention sous la forme d'une production industrielle ou de la création de services sur le territoire de l'Union Européenne, pourrait se révéler économiquement contreproductive.

 

Il en résulterait que, lorsque les établissements n'auraient pas pu identifier de licencié ayant la capacité de s'engager à assurer la production industrielle ou la création de services sur le territoire de l'Union Européenne tout en assurant un développement de la technologie licenciée dans l'intérêt des patients, ils ne pourraient pas valoriser l'invention. Par ailleurs, une telle obligation pourrait réduire les opportunités de co-développement de l'invention avec les laboratoires de dimension internationale, modèle qui apparaît aujourd'hui privilégié dans un contexte de redéploiement de la stratégie de ces industriels. Cette absence de valorisation avec l'industrie conduirait dans la majorité des cas vers une impossibilité de développer l'invention, soulevant des questions en matière de santé publique.

 

Il conviendrait donc de revenir à un mécanisme de préférence permettant aux personnes publiques, qui n'ont pas raisonnablement pu identifier un licencié, capable de développer l'invention, et qui remplisse la condition de production ou de création de service sur le territoire de l'Union Européenne, de valoriser librement l'invention auprès d'entreprises ayant leur capacité de production ou de création de services hors Union Européenne et ce, afin d'assurer le développement de l'invention conformément à leurs missions de service public.

 

 

II. Impact sur le développement et l'activité des entreprises des secteurs pharmaceutique et biotechnologique

 

L'évolution proposée de l'article L.329-7 du Code de la recherche ne concerne de prime abord que les personnes publiques.

 

- Mais elle impacte aussi directement les entreprises des secteurs biotechnologique et pharmaceutique puisque celles-ci devront, si elles veulent pouvoir développer et exploiter une invention issue d'une recherche académique française financée par des fonds publics, s'engager à assurer la production industrielle de l'invention ou à créer des services sur le territoire de l'Union Européenne.

- Si une interprétation stricte du texte actuel devait être retenue, cet engagement sera répercuté en cascade sur tout nouveau contrôlant de l'entreprise, tout repreneur de l'entreprise, tout cessionnaire ou sous-licencié du contrat de licence portant sur l'invention concernée.

 

 

De telle sorte que cet engagement de production ou services sur le territoire de l'Union Européenne pourrait être un frein important au développement des jeunes pousses et PME qui, dans le domaine des sciences du vivant, prennent souvent en licence des inventions à un stade très amont, avant même toute phase clinique.

 

En effet, il apparait que les jeunes pousses et PME n'ont le plus souvent pas vocation à amener elles-mêmes la technologie sur le marché, mais sont tributaires pour ce faire de mécanismes de sous-licence ou de rachat au profit de sociétés ayant les capacités (en termes de financement et de responsabilité) d'un déploiement commercial. Anticiper au stade de la prise de licence par la jeune pousse ou la PME que la production industrielle ou la création de services devra être effectuée sur le territoire de l'Union Européenne constituerait une forte contrainte pour lesdites sociétés dans leur stratégie de développement qui risquerait de (i) faire renoncer certains investisseurs potentiels à s'engager et ainsi être préjudiciable à la création de la société,  notamment la création d'emplois en résultant et (ii) à plus long terme, de freiner ou empêcher le développement de la société et donc l'arrivée du produit final sur le marché, au détriment des patients.

 

Favoriser un mécanisme de préférence permettrait aux PME de ne pas avoir à s'engager à un stade précoce sur une étape du développement qui, dans les sciences du vivant, intervient près d'une dizaine d'années plus tard, et leur laisserait ainsi la maîtrise de leur stratégie de développement afin d'assurer la meilleure exploitation possible des technologies académiques licenciées.

 

 

III. Conclusion

 

Revenir à une écriture privilégiant un mécanisme de préférence - et non d'obligation -, tel que figurant à l'actuel article L. 329-7 du Code de la recherche, étendu aux inventions issues de recherches financées par dotations de l'Etat et des collectivités territoriales ou par subventions d'agences de financement nationales, assurerait un accès aux résultats de ces recherches aux PME (grâce à la priorité figurant dans le projet d'article L. 329-7) sans freiner le développement futur des PME et des technologies académiques exploitées.

 

Les personnes publiques auraient ainsi uniquement pour obligation de valoriser les inventions générées par des recherches issues de fonds publics « de préférence auprès des entreprises qui s'engagent à une exploitation de l'invention sous la forme d'une production industrielle ou de la création de services sur le territoire de l'Union Européenne et parmi ces entreprises prioritairement auprès d'entreprises employant moins de deux cent cinquante salariés ».

 

Ce mécanisme se rapprocherait du mécanisme existant en droit américain, l'article 35 USC §202 dit « Bayh-Dole Act », qui a fait ses preuves et qui est également basé sur un système de préférence au profit des PME.

 

 

A propos de France Biotech :

France Biotech (www.france-biotech.org) est l'association française des entreprises des sciences de la vie et de leurs partenaires. Sa mission est de contribuer à hisser l'industrie française des sciences de la vie au rang de leader en Europe. France Biotech est un moteur de changement qui agit auprès des pouvoirs publics, des organisations économiques, de la recherche académique, des media et de la communauté des investisseurs notamment, pour favoriser l'émergence de l'industrie des Sciences de la Vie comme une industrie de pointe prioritaire, et améliorer l'environnement économique, juridique, réglementaire et managérial de ces entreprises. France Biotech compte aujourd'hui 150 adhérents. Les entreprises des sciences de la vie membres de l'association regroupent la grande majorité des investissements, des employés et des produits innovants du secteur.

 

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