Microbiome et diabète: Malade ou sain ? Le métabolisme bactérien nous apporte la réponse et l'explication

ESCH-SUR-ALZETTE, Luxembourg, October 11, 2016 /PRNewswire/ --L'intestin est un système complexe : d'innombrables bactéries le colonisent et il nous aide à digérer la nourriture. Des scientifiques du Luxembourg Centre for Systems Biomedicine (LCSB) de l'Université du Luxembourg, en collaboration avec l'IBBL (Integrated Biobank of Luxembourg), le Centre Hospitalier de Luxembourg et le Centre Hospitalier Emile Mayrisch, ont mis au point une méthode pour étudier cet écosystème - le microbiome intestinal - à un niveau de détail inédit. Cette nouvelle approche permet d'examiner le potentiel génétique des bactéries en décodant leur ADN et en évaluant leur activité par séquençage de l'ARN, les premières molécules qui apparaissent lors de la transcription de l'ADN.

 

 

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Les chercheurs sont également capables d'identifier les protéines synthétisées par la suite et qui catalysent les réactions métaboliques. « Pour la première fois, nous arrivons à observer simultanément ce qui se passe aux trois niveaux de l'ADN, l'ARN et des protéines au sein des communautés microbiennes de l'intestin » affirme Paul Wilmes, professeur et responsable du groupe Ecosystems Biology qui a mené l'étude au LCSB. « Cette étape est importante et nous aide à mieux comprendre des maladies telles que le diabète, sur lequel le microbiome intestinal peut avoir un effet ». Les chercheurs ont découvert, par exemple, que la composition de la flore intestinale différait à peine entre les patients diabétiques et les individus sains. D'autre part, les gènes activés ou désactivés par les bactéries présentes peuvent être très différents. Les chercheurs publient aujourd'hui leurs résultats dans la revue britannique renommée « Nature Microbiology » (DOI : 10.1038/NMICROBIOL.2016.180).

L'étude MUST (sur les familles multiplexes diabétiques) portait sur des individus atteints de diabète de type 1 depuis plusieurs années et qui ont fourni des échantillons de selles à l'IBBL, partenaire majeur de l'étude. « Nous avons étudié les bactéries présentes dans les échantillons de selles de ces individus », explique Dr Anna Heintz-Buschart, auteur principal de l'étude. « Puis nous avons analysé des échantillons de selles provenant de certains de leurs proches en bonne santé ». Les chercheurs ont découvert que la différence de composition en espèces bactériennes entre les individus atteints de diabète et les autres était nettement moins importante qu'on avait pu le croire pendant longtemps. « Néanmoins », poursuit Anna Heintz-Buschart, « il existe des différences notables concernant l'activité des bactéries ».

Dans le diabète de type 1, ces différences surviennent sans doute quand le système immunitaire attaque ses propres cellules productrices d'insuline dans le pancréas. Les dégâts qui en résultent peuvent radicalement changer la composition des sucs digestifs. « Les bactéries de l'intestin doivent s'adapter aux changements dans leur environnement » dit A. Heintz-Buschart. « Pour y parvenir, elles modifient leur métabolisme, autrement dit elles modifient la quantité de protéines ou de vitamines, telle la thiamine, qu'elles produisent. Ce qui compte ici, c'est qu'une variation des niveaux de thiamine dans le corps peut accentuer l'évolution de la maladie ». Les bactéries auparavant bénéfiques deviennent ainsi un risque pour la santé et peuvent aggraver l'état de la personne atteinte.

Une telle précision dans la description des changements liés à la maladie qui s'opèrent dans le microbiome et l'éclairage sur leurs effets fonctionnels dans le corps n'étaient pas possibles jusqu'ici, affirme Paul Wilmes : « Nous étions capables de déterminer la composition en espèces de l'écosystème intestinal grâce aux analyses de l'ADN traditionnelles, mais nous ignorions ce qu'il s'y passait réellement à un moment précis. Pour faire une analogie avec la société humaine : nous étions capables de recenser les individus sans savoir quelle était leur profession. Maintenant nous savons qui fait quoi et quand ». La percée trouve son origine dans la combinaison de différentes techniques d'analyse : « Pour la première fois, nous avons examiné les informations génomiques, transcriptomiques et protéomiques ensemble, ce qui veut dire que nous avons étudié simultanément l'ADN, l'ARN et les protéines du microbiome. Aujourd'hui, nous sommes en mesure de savoir quels gènes sont transcrits et quelles protéines sont produites à tel moment. Cette étude simultanée à trois niveaux nous donne une toute nouvelle vision des processus fonctionnels intervenant dans l'intestin, par exemple concernant le métabolisme ».

Les professionnels de la santé avec lesquels Paul Wilmes et son équipe ont collaboré fondent beaucoup d'espoir sur cette nouvelle méthode de recherche. Dr Carine de Beaufort en fait partie, elle qui mène des recherches et traite des patients au LCSB et au Centre Hospitalier de Luxembourg. Elle a joué un rôle-clé pour trouver des familles réunissant des personnes saines et malades prêtes à participer l'étude. « Nous attendons de ces études qu'elles nous aident à identifier des biomarqueurs » affirme-t-elle. « Il s'agit de molécules, des protéines par exemple, qui sont produites ou dont le niveau dans le corps varie au début d'une affection diabétique. Ces biomarqueurs faciliteraient le diagnostic et permettraient de prendre des mesures préventives ou thérapeutiques à un stade très précoce ».

Pour faciliter la recherche de ces biomarqueurs, l'étude doit continuer, assure Paul Wilmes. « Nous souhaitons maintenant travailler avec des familles qui ont des enfants ayant une forme précoce de diabète. Il est particulièrement important de détecter les indicateurs de cette maladie le plus tôt possible chez les jeunes. Après tout, plus les médecins peuvent intervenir tôt, mieux ils peuvent limiter les complications pour le reste de la vie ». Paul Wilmes envisage des études mécanistiques détaillées permettant de mieux comprendre les fonctions complexes du microbiome : « Ainsi, nous pourrons savoir comment des différences fonctionnelles concernant, disons, la biosynthèse de la thiamine par le microbiome intestinal, sont liées au diabète de type 1. Les expériences comme l'étude MUST sont décisives pour y parvenir, pour générer des hypothèses ».

Le projet MUST est une collaboration entre le LCSB, l'IBBL, le Centre Hospitalier de Luxembourg et le Centre Hospitalier Emile Mayerisch. Le projet a était initié au sein du Personalized Medicine Consortium et a reçu des financements de l'IBBL et via les programmes ATTRACT, CORE, INTER et AFR du Fonds National de la Recherche (FNR) de Luxembourg.

Notes à l'attention de la rédaction :  

Bibliographie :

Anna Heintz-Buschart, Patrick May, Cédric C. Laczny, Laura A. Lebrun, Camille Bellora, Abhimanyu Krishna, Linda Wampach, Jochen G. Schneider, Angela Hogan, Carine de Beaufort and Paul Wilmes: Integrated multi-omics of the human gut microbiome in a case study of familial type 1 diabetes. Nature Microbiology.

Contact pour plus d'informations : Ass. Prof. Dr. Paul Wilmes, E. paul.wilmes@uni.lu, T. 352-46-66-44-6188

Thomas Klein
Science Editor
Communications Department

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