Le VIH se réplique aussi dans les cellules T CD4 quiescentes

Une étude publiée dans la revue Science révèle que, dans les jours qui suivent la contamination par voie sexuelle, la réplication du virus du sida (VIH) n’a pas seulement lieu dans les lymphocytes T CD4 activés qui prolifèrent à la porte d'entrée muqueuse et dans les tissu lymphoïdes mais également, de façon surprenante, dans des cellules T CD4 quiescentes. Or la plupart de ces cellules latentes infectées par le VIH-1 résistent au traitement antirétroviral.

Cette étude montre donc qu'il existe au sein du réservoir latent, que l'on considérait jusqu'à présent composé de cellules infectées et au repos, des lymphocytes T qui sont en réalité activement engagés dans la production de virus.

Ces travaux montrent par ailleurs qu’après contamination sexuelle le virus infecte très tôt principalement les cellules T CD4, et non pas en premier lieu les macrophages et les cellules dendritiques, ce qui s’oppose au modèle classique de transmission de l’infection rétrovirale.

Les chercheurs ont infecté par voie vaginale des macaques avec du SIV (virus de l’immunodéficience simienne). Ils ont observé, dès J+3, une prépondérance de cellules T hébergeant l’ARN viral (90 %) au niveau de la porté d’entrée, en l’occurrence dans la lamina propria de l’endocol.

Les chercheurs ont étudié le nombre et la nature des cellules immunitaires infectées dans les jours qui ont suivi l'inoculation du virus par voie muqueuse. Leurs résultats vont à l’encontre de la thèse habituellement soutenue selon laquelle le virus se réplique d’abord dans les macrophages et les cellules dendritiques avant d’infecter les lymphocytes T CD4.

Selon les auteurs, l'importante participation de lymphocytes T CD4 infectés à un stade extrêmement précoce de l’infection souligne le rôle crucial joué par ces cellules dans la propagation du virus.

Les résultats sur l’état d’activation de ces cellules T infectées ont surpris les chercheurs. " Nous nous attendions à ce que les cellules T refermant l’ARN viral soient activées et en cycle dans la mesure où l’activation in vitro des cellules T et la réplication rétrovirale sont deux phénomènes que l’on considère généralement comme indissociables ".

De fait, les auteurs ont observé que le SIV peut aussi se répliquer, même si les taux de production sont faibles, dans des lymphocytes T CD4 dépourvus des marqueurs usuels d’activation (HLA-DR) et de prolifération (Ki67) des cellules T. Autrement dit, l’infection peut se propager dans des cellules CD4 habituellement considérées comme quiescentes.

Ces données obtenues chez le macaque ont été confirmées chez l’homme : après analyse de biopsies ganglionnaires pratiquées 2 à 15 jours après la survenue d’une infection aiguëà VIH chez quatre patients.

Infection productive par des cellules T peu ou pas activées

Au total, les chercheurs ont observé" aux stades les plus précoces de l’infection à VIH que la plupart des cellules contenant de l’ARN viral sont des cellules T ; que le VIH-1 se réplique dans ces cellules, que celles-ci soient ou non dans un état d’activation et de prolifération ; et que les cellules qui ne prolifèrent pas ont un faible taux d’expression des gènes du virus et vivent plus longtemps ".

Cette faible expression virale pourrait être un moyen pour les rétrovirus d’échapper aux défenses immunitaires tout en favorisant l’installation d’une infection persistante. Il n’en reste pas moins, estiment les chercheurs, qu’elle représente un obstacle à la mise en œuvre d’une stratégie de prévention vaccinale.

La dynamique des populations cellulaires T infectées, activées (ki67+) ou non (Ki67-) a également été étudiée après administration d’associations d’antirétroviraux puissants et efficaces.

Il apparaît que le nombre des cellules T CD4 (Ki67+) chute d’un facteur 9 deux jours après l’instauration de la multithérapie, alors que la population des cellules T CD4 quiescentes (Ki67-) ne diminue que d’un facteur 1,5. En fait, les lymphocytes T CD4 activés ont une courte durée de vie, contrairement aux cellules T quiescentes.

Coordonnée par Ashley Haase (Université de Minneapolis, Minnesota), cette étude a associé des chercheurs des universités de Harvard (Boston), de Pittsburg (Pennsylvanie), du centre de recherches sur les primates de Davis (Californie), des équipes basées à Chicago (Illinois) et San Diego (Californie), ainsi que le centre médical académique d’Amsterdam (Pays-Bas) et l’institut Bernhard-Nocht de médecine tropicale de Hambourg (Allemagne).

Source : Science, Vol.286, 12 novembre 1999, 1353-57.

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