Un « agent double » efficace contre le cancer

Des équipes conduites par Ara Hovanessian, Jean-Paul Briand et José Courty(1), trois directeurs de recherche du CNRS, ont démontré pour la première fois l'efficacité d'une molécule, dénommée HB-19 dans le traitement du cancer. Cette molécule cible spécifiquement la nucléoline de surface, une protéine nécessaire à la croissance des cellules tumorales mais également à l'angiogénèse, c'est à dire la formation des nouveaux vaisseaux sanguins indispensables à l'apport d'oxygène et de nutriments aux cellules cancéreuses. Ces résultats prometteurs, protégés par un brevet CNRS, sont publiés le 18 juin 2008 dans la revue PLoS ONE et ouvrent de nouvelles perspectives à une thérapie anticancéreuse efficace et sans toxicité.

La nucléoline est essentiellement connue comme une protéine présente dans les noyaux des cellules. Mais les travaux réalisés au cours de ces dernières années par l’équipe d’Ara Hovanessian ont démontré qu’elle est également exprimée à la surface cellulaire où elle fonctionne comme un récepteur pour des facteurs de croissance. L’expression de la nucléoline à la surface cellulaire est particulièrement élevée dans les cellules activées en multiplication rapide, comme les cellules tumorales, et dans les cellules endothéliales(2) impliquées dans la formation d’un réseau de capillaires sanguins entourant les tumeurs. Ces données suggèrent que la nucléoline exprimée à la surface cellulaire est une cible importante et prometteuse pour la thérapie anticancéreuse.

Ara Hovanessian et Jean-Paul Briand ont conçu et synthétisé chimiquement la molécule HB-19(3) qui, en s’associant d’une façon spécifique à la nucléoline de surface, entraîne l’internalisation du complexe et la dégradation de cette protéine multifonctionnelle.

Les chercheurs du CNRS ont mis en évidence qu’HB-19 bloque non seulement la multiplication des cellules issues de différentes tumeurs humaines (comme le cancer de la prostate, du sein, du colon ou le mélanome), mais également l’angiogénèse tumorale. Cette dualité d’action vis-à-vis des cellules tumorales et de l’angiogénèse fait d’HB-19 un puissant agent anticancéreux.

Ces résultats ont été confirmés à l’aide d’un modèle expérimental du cancer du sein chez des souris greffées avec des cellules tumorales d’origine humaine : l’administration d’HB-19 par voie sous-cutanée ou intrapéritonéale(4) à 2-3 jours d’intervalle pendant 30 jours a entraîné une inhibition significative de la progression de tumeurs, voire même dans plusieurs cas l’éradication de cellules tumorales.

En plus de l’efficacité de son action antitumorale sur le développement de carcinome mammaire humain chez la souris, HB-19 ne présente aucune toxicité tissulaire, contrairement à de nombreux autres traitements couramment utilisés en clinique. Après interaction avec la nucléoline de surface et internalisation dans les cellules, HB-19 n’entre pas dans le noyau, ce qui permet d’expliquer l’absence d’effets secondaires indésirables comme ceux couramment associés à la chimiothérapie et à la radiothérapie. Autre avantage de cette molécule : très soluble dans les milieux physiologiques, sa synthèse est réalisable à l’échelle industrielle par les techniques conventionnelles de chimie peptidique.

La société ImmuPharma qui a obtenu la licence d’exploitation exclusive a réalisé le développement d’une famille de composés de deuxième génération plus efficaces qu’HB-19 et a débuté les développements précliniques réglementaires afin de pouvoir commencer une étude clinique de phase I(5) au début de l'année 2009.

Descripteur MESH : Cellules , Croissance , Oxygène , Recherche , Vaisseaux sanguins , Tumeurs , Carcinome , Cellules endothéliales , Chimie , Famille , Mélanome , Prostate , Radiothérapie , Réseau , Tumeurs de la prostate , Tumeurs du sein

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