DES « MÉDECINES ALTERNATIVES ET COMPLÉMENTAIRES » (MAC)

DES « MÉDECINES ALTERNATIVES ET COMPLÉMENTAIRES » (MAC)

UN DÉBAT DE LONGUE DATE

Le 11 mai 1999, la Commission européenne adoptait un projet de résolution audacieux sur des sujets extrêmement délicats, les « médecines alternatives » et « thérapies alternatives et complémentaires » :

« ll faut encourager la reconnaissance officielle de ces médecines alternatives dans les facultés de médecine et leur pratique dans les hôpitaux. Une formation des médecins allopathes aux thérapies alternatives et complémentaires doit être assurée en prévoyant les cycles denseignement adéquats dans les facultés. Cependant, la médecine alternative devrait pouvoir être pratiquée également par tout praticien de médecine non conventionnelle correctement formé. Des normes similaires, y inclus des règles d’éthique, devraient sappliquer à la fois aux médecins et aux praticiens de médecine non conventionnelle » (1)

Qu’en est-il aujourd’hui ?

LES FRANÇAIS, LEUR SANTÉ ET LEUR BIEN-ÊTRE

« Mieux vaut prévenir que guérir. » Inscrit dans la sagesse populaire, cet adage n’aura sans doute jamais été autant appliqué en France ces dernières années.

L’engouement des Français pour les nombreuses approches naturelles qui visent à prévenir, et par conséquent à préserver leur santé par une bonne hygiène de vie, n’est pas nouveau. Il ne cesse de croître.

Dans l’alimentation, l’immense succès du « Bio » en est un des nombreux indicateurs. Les Français s’inscrivent massivement dans des démarches préventives de « santé naturelle ».

  • Hygiène de vie (alimentation, plantes naturelles, activité physique…),
  • Développement personnel (Yoga, méditation, hypnose…),
  • Médecines douces (approches complémentaires aux soins allopathiques.).

Devant un tel phénomène de société, promus par un « bouche à oreille » constant, plus de 30 000 « thérapeutes » (2) non professionnels de santé sont recensés (3) en France et régions limitrophes. Ce nombre est certainement bien inférieur à la réalité !!

Les pratiques traditionnelles de prévention, de croissance personnelle ou de soins « non-conventionnels », si elles sont reconnues sur certains continents depuis des millénaires (Inde, Chine, Afrique, etc.), se développent exponentiellement en France et de ce fait interrogent.

La médecine conventionnelle tente précautionneusement d’intégrer certaines de ces approches « non — conventionnelles » à ses pratiques conventionnelles. Ceci n’est pas sans poser quelques questions d’ordre scientifique, légal et éthique.

Pour bien nous situer, commençons par nous remémorer ce qu’est une médecine conventionnelle, ce qu’est une médecine non conventionnelle et ce qu’est une approche non conventionnelle.

LA MÉDECINE CONVENTIONNELLE

La médecine conventionnelle occidentale est celle qui est enseignée dans les facultés de médecine en vue d'obtenir le diplôme et le titre de médecin. Reconnue par les systèmes de santé, elle repose sur des traitements qui ont été scientifiquement validés. Cette validation s’obtient par des essais cliniques réussis. Ils doivent répondre favorablement à des processus stricts en termes d’autorisation, de réalisation, d’éthique et de pertinence scientifique. Cette méthodologie rigoureuse vise à prouver qu’un traitement soigne et tend à la guérison des maladies dont il est question.

Beaucoup plus rarement, la reconnaissance scientifique d’une technique de soin peut aussi être obtenue, après plusieurs années de recul, par l’approbation de la majorité des professionnels de la spécialité concernée. Ses conditions et protocoles d’utilisation sont alors minutieusement définis.

C’est ainsi que la médecine conventionnelle nous propose une médecine scientifique dont l’efficacité est prouvée. Les matières enseignées aux futurs médecins dans les facultés de médecine reposent sur des pratiques « conventionnelles ». Le doctorat en médecine et les diplômes des spécialités assurent aux patients qui consultent un médecin en France, une médecine conventionnelle. L’obtention des diplômes nationaux de l’ensemble des professionnels de santé est également basée uniquement sur l’enseignement de « soins conventionnels ».

C’est dans ces conditions et cet état d’esprit qu’un patient consulte un médecin. L’ordre des médecins (4), la direction générale de la santé (5), la haute autorité de santé (6) et le code de santé publique sont aussi là pour garantir que lorsque nous consultons un médecin en France, les moyens mis à la disposition de notre santé sont conventionnels, c’est-à-dire scientifiquement éprouvés et reconnus.

Ces faits sont les fondamentaux de notre médecine conventionnelle en France. C’est aussi ce qui lui permet de remporter chaque jour de nombreux combats face aux maladies, de guérir des millions de patients chaque année, de nous permettre de vieillir en meilleure santé, et de compter parmi les systèmes de santé les plus performants au monde.

Cependant, il existe en parallèle de la médecine factuelle, différentes approches de bien-être, de développement personnel et de soins non conventionnels qui semblent participer de certaines façons à la santé des Français, sans être des médecines conventionnelles pour autant.

« Ces pratiques se développent parallèlement à la médecine “ conventionnelle ”, en France et partout dans le monde. Elles sont également en progression dans le champ du bien-être, de la nutrition et de l’apparence esthétique. »(7)

De nombreux médecins les conseillent à leurs patients comme complément à leur traitement. Des hôpitaux font même appel à certains de ces praticiens « non-professionnels de santé » qui les pratiquent alors, par exemple, auprès de grands brûlés et autres cas cliniques (8).


Voyons tout cela d’un peu plus près. 

DES MÉDECINES ET APPROCHES NON-CONVENTIONNELLES

Les approches non conventionnelles sont appelées — à tort ou à raison — médecines alternatives, médecines complémentaires, médecines naturelles, médecines douces, médecines parallèles, médecines holistiques, thérapies complémentaires ou pseudo-médecines.

L’Académie de Médecine Française conseille de privilégier le terme de « thérapies complémentaires » (9).

La Commission européenne utilise l’appellation « médecines non conventionnelles » (10).

L’Organisation Mondiale de la Santé (11) quant à elle distingue les « médecines traditionnelles » (MT), des « médecines complémentaires et alternatives » (MAC).

  • Au sujet des « MT », l’OMS stipule que :

« La médecine traditionnelle est très ancienne. C’est la somme de toutes les connaissances, compétences et pratiques reposant sur les théories, croyances et expériences propres aux différentes cultures, qu’elles soient explicables ou non, et qui sont utilisées dans la préservation de la santé, ainsi que dans la prévention, le diagnostic, l’amélioration ou le traitement de maladies physiques ou mentales. »(12)

  • Au sujet des « MAC », l’OMS stipule que :

« Le terme “médecine complémentaire” ou “médecine alternative” est utilisé de manière interchangeable avec “médecine traditionnelle” dans certains pays. Elles concernent une large gamme de pratiques de soins qui ne font pas partie des traditions du pays et qui ne sont pas intégrées dans le système de santé dominant. »(13)

  • Rappelons que pour l’OMS la santé se définit ainsi :

« La santé est un état complet de bien — être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmités. »(14)

  1. Ernst, spécialiste de l’évaluation des « médecines alternatives » en propose une définition :

« […] notre définition de médecine alternative est n’importe quelle thérapie qui n’est pas acceptée par la majorité des médecins classiques, et qui typiquement, revendiquent des mécanismes se situant hors de la compréhension actuelle de la médecine moderne. Dans le langage de la science, les thérapies alternatives sont dites biologiquement non plausibles. »(15)

Une enquête récente (16) sur les « MAC » fait ressortir de nombreux points importants dont :

  • 40 % des Français y font appel,
  • 78 % les jugent efficaces, utilisées en prévention,
  • 72 % les évaluent comme importantes en complément des traitements conventionnels, même dans les cas de cancers.

Notons que les appellations :

  • « médecines alternatives et complémentaires » et « thérapies complémentaires » invitent à leur usage,
  • « Pseudomédecines » engage à les éviter,
  • « Médecines non conventionnelles » est plus informatif et tend vers une certaine neutralité.

En revanche restent les termes « médecine et thérapie » qui, de notre point de vue et dans tous les cas, posent problème. Ces sèmes (17) en disent trop.

Nous avons vu précédemment ce qu’était une médecine et/ou une thérapie conventionnelle en France. Elles répondent à des critères rigoureux et sont régies par le Code de santé publique.

Dans ce cas, il ne peut pas y avoir une « médecine non-médecine » et/ou une « thérapie non-thérapie ». Le paradoxe est trop prégnant face à une catégorie de MAC « fourre tout » et bien trop floue.

« Il n’était pas possible de considérer dans ce rapport toutes les thérapies complémentaires, car elles sont très nombreuses : la liste MeSH comporte 17 catégories de thérapies complémentaires (annexe 2) et la Miviludes dénombre 400 pratiques “à visée thérapeutique” (dont la plupart ne méritent évidemment pas l’appellation de thérapie complémentaire). »(18)

« Acupuncture (electroacupuncture, moxibustion) —Anthroposophie — Auriculothérapie —Homéopathie —Médecine traditionnelle : africaine, arabe, ayurvédique et chinoise —Mésothérapie —Thérapies corps esprit —aromathérapie —hypnose —psychodrame —psychophysiologie —psychothérapie —tai chi —thérapie par le rire —toucher thérapeutique —yoga —Manipulations de l’appareil locomoteur —chiropratiques —ostéopathiques —acupressure —kinésiologie —massage Naturopathie — Organothérapie —Phytothérapie — Réflexothérapie — Rajeunissement — Santé holistique —Thérapies sensorielles par les arts —Spéléothérapie — Thérapies spirituelles : chamanisme, guérison par la foi, guérison mentale, magie, méditation, occultisme, radiesthésie. »(19)

Nous voyons bien là que la grande catégorie des MAC souffre cruellement d’imprécision (sont absentes les 400 autres pratiques recensées par la Miviludes).
À y regarder de plus près, on ne peut que constater qu’y figurent :

  • des approches thérapeutiques,
  • des approches préventives,
  • des approches curatives,
  • des approches psychothérapeutiques,
  • des approches de bien-être et de développement personnel,
  • et enfin des approches spirituelles ou mystiques.

Il apparaît évident que ces six sous-catégories, assimilées aux MAC, n’en sont pas toutes. Les approches psychothérapeutiques, les approches de bien-être et de développement personnel, les approches préventives et les approches spirituelles ne peuvent pas être des médecines. Tout ce qui participe à la santé d’une façon indirecte doit-il entrer dans le champ des médecines, conventionnelles ou non conventionnelles ?

Il nous paraît extrêmement important de bien en faire la distinction. Si nous ne le faisions pas, nous pourrions pousser jusqu’au bout le schéma de référence actuel des MAC.

Extrêmement large et absolument flou, il se résume à intégrer tout ce qui pourrait avoir des effets psychothérapeutiques, de bien-être, de prévention et/ou spirituels sur la santé. Cela donnerait lieu à toutes les formes d’extravagances et/ou de dérives :

L’équitation médicale, les voyages médicaux, la natation médicale, le sport médical, une alimentation saine médicale, le brossage des dents médical, une sexualité équilibrée médicale, le cinéma médical, le théâtre médical, la prière médicale, les marchés médicaux, la marche à pied médicale, les soins de beauté médicaux, les relations sociales médicales, la radiesthésie médicale, etc.

Et comme la guérison par la foi apparaît aussi dans la liste des MAC, faudra-t-il imposer des médecins à Lourdes pour ne pas que les religieux soient accusés d’exercice illégal de la médecine ? 

Soyons plus sérieux, il apparaît important de bien distinguer les répercussions bénéfiques que peuvent avoir certaines approches non conventionnelles et l’usage qui peut en être fait raisonnablement, des médecines traditionnelles qui pourraient être intégrées en partie à des systèmes plus conventionnels.

Les voyages, le grand air, les activités physiques, une bonne alimentation, etc., le yoga, la médiation, l’hypnose (dans une dynamique d’épanouissement), et tant d’autres approches non conventionnelles, présentent un réel bénéfice pour les Français soucieux de leur santé (en prévention) et de leur épanouissement ; cela ne suffit pas à en faire des médecines ou pseudo-médecines pour autant. « Médicaliser » systématiquement ce qui peut contribuer au bien-être de la personne humaine est-il indispensable ?

Seules les approches non conventionnelles ou traditionnelles qui se présentent comme thérapeutiques et/ou curatives devraient pouvoir prétendre à figurer dans la catégorie des MAC. Restent bien entendu aux instances compétentes, à en évaluer la pertinence.

Un autre sème pose sérieusement problème :

Le terme « Alternative » contenu dans « médecine alternative ». N’est-ce pas dangereux d’associer alternatif à médecine lorsque l’on sait qu’un retard de prise en charge par la médecine conventionnelle peut entraîner une perte de chance de guérison ou d’amélioration d’une pathologie grave ?

Attention nous n’affirmons pas qu’il ne peut y avoir de MAC, de « médecines non-conventionnelles » ou de « thérapies complémentaires ». Nous suggérons plutôt que ces « médecines » et « thérapies » soient répertoriées précisément.

En l’état, ces appellations sont des catégories « fourre tout », où l’imprécision et l’absence de critères précis alimentent allègrement des confusions et des interprétations risquées, voire des abus.

Les Français, tout comme la science, ne peuvent se satisfaire de points de suspension (…), en lieu et place d’une taxinomie rigoureuse et précise.

Il est vivement recommandé de n’utiliser l’ensemble des MAC, « médecines non-conventionnelles », « thérapies complémentaires », et « approches complémentaires » que comme complément à la médecine conventionnelle, et non comme « alternative » ou substitut. Il sera important d’en informer sans cesse le grand public.

Tous soins non conventionnels de santé, et plus globalement toutes approches complémentaires, qu’ils soient pratiqués par un professionnel de santé ou par un praticien non professionnel de santé, ne peuvent avoir que des rôles préventifs, de mieux-être et/ou de complément. Ils ne peuvent et ne doivent pas, en l’état, se substituer à un avis ou à un traitement médical.

Devant la quantité importante de praticiens (non professionnels de santé et professionnels de santé), et la multiplicité de leurs pratiques non conventionnelles, il nous paraît plus raisonnable et prudent de parler alors d’« approches complémentaires » et d’éviter les termes « médecines », « thérapies » et « alternative » tant que celles-ci, se présentant ainsi, n’auront pas été approuvées et/ou validées par les autorités de santé compétentes (20).

DES ASPECTS JURIDIQUES

Au-delà des principes de clarté indispensables à toute discipline, des aspects juridiques importants sont à considérer. Exceptions faites de l’ostéopathie et de la chiropraxie qui ont été légalisées en 2002 par la loi Kouchner(21) aucune « approche complémentaire » n’est juridiquement encadrée. Même si la Haute Autorité de Santé, dans le cadre de l’application des directives de l’OMS quant aux politiques de santé publique, encourage au développement de ces pratiques non conventionnelles, rien n’est légalement prévu en France.

Sont suspendues au-dessus de ces pratiques non-conventionnelles deux épées de Damoclès.

La première épée de Damoclès concerne les médecins et soignants exposés au risque d’être poursuivis pour « charlatanisme ». En effet, la majorité des MAC n’ayant pas fait l’objet d’études scientifiques quant à leurs effets et leur non-dangerosité, et d’autres présentant des résultats insuffisants et/ou égaux à des effets placebo, elles pourraient être considérées par des juges comme des « remèdes illusoires ». En cas de poursuites pénales, le praticien et/ou l’établissement de santé pourraient alors être condamnés pour charlatanisme.

« La liberté de prescription du médecin est encadrée (articles L. 162-2 du code de la sécurité sociale et R. 4127-8 du CSP). En principe, le médicament prescrit doit bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché (article L. 5121-8 du CSP), être dispensé dans le cadre d’une recherche biomédicale (loi du 9 août 2004) ou faire l’objet d’une autorisation temporaire d’utilisation (L. 5121-12 du CSP). Néanmoins, la prise en considération de l’intérêt du patient peut justifier une prescription ne répondant à aucun de ces critères.

Deux types de traitements peuvent relever du charlatanisme : les remèdes insuffisamment éprouvés ou les remèdes illusoires lorsqu’ils sont l’un et l’autre présentés comme salutaires ou sans danger. » Il a été jugé par le Conseil d’État que la juridiction disciplinaire avait pour obligation d’apprécier le caractère insuffisamment éprouvé d’un remède non seulement au regard de la littérature française, mais également internationale. »(22)

— La seconde épée de Damoclès concerne les praticiens non conventionnels qui affirment pratiquer une « médecine » ou des « soins thérapeutiques » et/ou se présentent comme « thérapeutes », fussent-ils alternatifs, doux, non conventionnels, complémentaires, traditionnels, etc. La pratique de la médecine et des soins thérapeutiques est réglementée en France. Toute personne non titulaire d’un diplôme médical qui établit un diagnostic et/ou préconise ou applique un traitement thérapeutique s’expose à des poursuites et une condamnation pour exercice illégal de la médecine. (23) En cas de poursuites le risque d’être condamné est élevé.

« Le droit pénal protège donc le monopole des médecins en matière de diagnostic et d’établissement d’un traitement de maladie, mais plus largement le monopole des professions de santé. Ainsi, encourent deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende les thérapeutes en tous genres qui s’essayent à la pratique de la médecine, de la pharmacie, etc.Cette situation peut sembler discutable lorsque l’on applique ce texte à la catégorie des médecines parallèles. L’approche contemporaine de la relation médecin-malade définissant l’autonomie du patient, son droit à l’information et le consentement aux soins comme essentiels semble pourtant favorable à leur meilleure reconnaissance. »(24)

 

« Le critère du “ remède illusoire ” employé dans la définition du charlatanisme nous semble devoir être manié avec précaution, tant il n’est pas évident qu’il y ait une totale adéquation entre l’absence de reconnaissance scientifique d’un traitement et son caractère illusoire. On ne peut affirmer que le rôle des médecines parallèles dans le traitement d’un certain nombre d’affections n’est qu’illusion au seul motif qu’il n’est pas scientifiquement démontré. De même, le critère retenu avec l’infraction d’exercice illégal de la médecine protège utilement le monopole médical. Néanmoins, une complémentarité pourrait être trouvée si, allant dans le sens de la loi du 4 mars 2002, le droit permettait la reconnaissance de formations spécifiques offertes aux non-médecins pour certaines disciplines ne relevant pas de la médecine traditionnelle. »(25)

Tous ces éléments montrent l’urgence de mieux désigner les MAC et les « approches non-conventionnelles », mais aussi, et surtout de légiférer aux fins de les encadrer dans leur pratique et leur développement. Ces futurs progrès devront mieux protéger, à la fois le grand public, le corps médical et les praticiens d’approches non conventionnelles.

MAC ET MÉDECINE CONVENTIONNELLE

Intégrer les MAC à la médecine conventionnelle interroge. Peuvent-elles sérieusement faire bon ménage ?
Lorsqu’une « approche non-conventionnelle » répond favorablement aux critères scientifiques de la médecine, elle devient une médecine conventionnelle. C’est ainsi que s’est faite progressivement la médecine conventionnelle.

Le corps médical ne doit-il pas demeurer un socle solide de connaissances scientifiques ? Ne serait-ce pas de son devoir de résister aux modes et aux tendances des MAC, tant que celles-ci n’ont pas fait scientifiquement leurs preuves ?
La médecine conventionnelle est un monopole en France et heureusement. Doit-elle pour autant étendre ce monopole à des approches psychothérapeutiques, de bien-être ou des « médecines » qui frisent parfois avec le surnaturel, quand elles ne se proposent pas complètement ainsi ?

La médecine conventionnelle, en souhaitant pratiquer des approches non conventionnelles au prétexte qu’elles rencontrent un certain succès auprès du grand public, pourrait laisser penser qu’elle est en panne de repères fiables. Ne gagnerait-elle pas à rester concentrée sur les fondamentaux qui l’ont élevée parmi les meilleures médecines au monde ?

De notre point de vue, les MAC présentent un réel risque de fragiliser une médecine factuelle solide en favorisant quelques excès.

Nos médecins actuels ne doivent pas devenir des gourous, des yogis ou des fascinateurs ; ils entraîneraient alors tout un corps médical à la dérive.

N’est-ce donc plus fondamental d’assurer aux Français une médecine qui repose sur de sérieuses garanties ? Les réponses médicales conventionnelles ne sont-elles plus en mesure de demeurer scientifiques ? Notre médecine ne s’est-elle pas engagée à le rester, ce pourquoi nous Français, y faisons appel, et ce pourquoi elle soigne et guérit efficacement certaines de nos maladies ?

Il serait dommage que les Français pâtissent d’une pratique de la médecine conventionnelle qui serait alors déviante ou très approximative.

Les cabinets médicaux, et plus globalement les institutions cliniques dédiées aux soins conventionnels ne peuvent pas devenir des grands bazars de la santé, où toutes les fantaisies placebo (inoffensives ou dangereuses) y auraient leur place.

On y verrait alors se tutoyer un « Vidal » et un grimoire. Au gré du médecin, les objets magiques se substitueraient parfois au bon vieux stéthoscope. Les séances de yoga, de méditation ou d’hypnose viendraient remplacer la psychologie clinique et la psychothérapie. Le médecin devenu chaman soignerait cette fichue arthrose au rythme de son tambour et de ses chants. Certains vaccins seraient remplacés par des talismans ?!! Les patients consulteraient leur médecin devenu pour l’heure grand gourou du développement personnel…

Une partie des Français est aujourd’hui troublée par un paradoxe ; celui des MAC pratiqués par des médecins et soignants, lorsque l’un d’eux propose à son patient (quand il ne le lui impose pas tout simplement) d’exercer sur lui une approche non conventionnelle. Du simple fait que cette approche soit pratiquée par le médecin conventionnel, elle devient dans l’esprit du patient, totalement conventionnelle.

Pourquoi ? Parce qu’il est profondément inscrit en chacun des Français qu’un médecin pratique la médecine conventionnelle, elle et elle seule uniquement. Les médecins auront beau bien expliquer, les patients auront du mal à se défaire de cette conviction bien enracinée dans la culture de notre pays et son histoire.
Qui pourra alors dire avec certitude ce que cette néo-médecine « MCAC » (médecine conventionnelle, alternative et complémentaire) lui réservera ?

Ne serait-il pas plus raisonnable d’observer la médecine conventionnelle et les approches non conventionnelles comme le « Yin » et le « Yang » d’une société en mutation ?

Les citoyens français méritent d’être mieux informés, c’est une évidence. Dans le même temps, ils doivent rester libres de choisir et d’élaborer eux-mêmes leurs parcours santé sur les conseils de leur médecin traitant.

Les MAC, les approches non conventionnelles et les médecines conventionnelles sont si différentes, ne gagneraient-elles pas à se distinguer davantage les unes des autres pour raisonnablement se compléter, plutôt que de se pervertir mutuellement ?

NOTES DE BAS DE PAGE

 

1) « Une approche européenne des médecines non conventionnelles », Rapport, Commission des questions sociales, de la santé et de la famille, Rapporteur : Mme Lara Ragnarsdóttir, Islande, Groupe des démocrates européens, Doc. 8435, 1999, p.6, Art. 30.

2) Au regard du code de santé publique, il nous semble que ces professionnels devraient privilégier un autre terme pour se distinguer des thérapeutes conventionnels et être en conformité avec la loi.

3) Cf. Annuaire des thérapeutes : www.annuaire-therapeutes.com

4) « L’Ordre des médecins est garant de la qualité des soins offerts à la population. À ce titre, il est linterlocuteur privilégié des patients. Il œuvre, au quotidien, pour préserver la qualité et la singularité de la relation médecin-patient qui est lun des éléments fondateurs de notre système de santé. » www.conseil-national.medecin.fr/qu-est-ce-que-l-ordre-1206

5) « La Direction Générale de la Santé (DGS) prépare la politique de santé publique et contribue à sa mise en œuvre. Son action se poursuit à travers 4 grands objectifs : préserver et améliorer l’état de santé des citoyens, protéger la population des menaces sanitaires, garantir la qualité, la sécurité et l’égalité dans laccès au système de santé, et mobiliser et coordonner les partenaires. » www.solidarites-sante.gouv.fr/ministere/organisation/directions/article/dgs-direction-generale-de-la-sante

6) « La HAS est une autorité publique indépendante qui contribue à la régulation du système de santé par la qualité. Elle exerce ses missions dans les champs de l’évaluation des produits de santé, des pratiques professionnelles, de lorganisation des soins et de la santé publique. » www.has-sante.fr

7) cf. http://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/qualite-des-soins-et-pratiques/securite/article/les-pratiques-de-soins-non-conventionnelles

8) cf. http://www.sante-nutrition.org/lhopital-souvre-aux-guerisseurs

9) cf. Académie Nationale de Médecine, rapport, D. Bontoux, D. Couturier, C. — J. Menkès, Thérapies complémentaires, acupuncture, hypnose, ostéopathie, tai-chi, leur place parmi les ressources de soins, 2013, p.1

10) Une approche européenne des médecines non conventionnelles, Rapport, Commission des questions sociales, de la santé et de la famille, Rapporteur : Mme Lara Ragnarsdóttir, Islande, Groupe des démocrates européens, Doc. 8435, 1999, p.1.

11) L’OMS est une institution spécialisée de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Elle coordonne les politiques de santé mondiale au sein des Nations Unies.

12) A. Guillaud, « Doit-on intégrer les “ médecines alternatives ” dans les systèmes de santé ? Eléments d’analyse générale, cas de la recherche clinique. » Philosophie. 2016, p. 18.

13) Ibid.

14) Ibid.

15) S. Singh et E. Ernst, Trick or Treatment ? : Alternative Medicine on Trial, London, Corgi, 2009.

16) Publiée dans le numéro 1168 de janvier 2015 de la revue « Science et Vie »

17) Le sème est la plus petite unité de signification (en sémantique).

18) cf. Académie Nationale de Médecine, rapport, D. BONTOUX, D. COUTURIER, C.-J.MENKES, Thérapies complémentaires, acupuncture, hypnose, ostéopathie, tai-chi, leur place parmi les ressources de soins, 2013, p.2.

19) Ibid. Index 2.

20) Reste à trouver les processus adéquats.

21) L’exercice de l’ostéopathie et de la chiropraxie par des non professionnels de santé a été légalisé en France par la Loi Kouchner de 2002, et réglementé par les décrets n° 2007-435 du 25 mars 2007 (ostéopathie) et n° 2011-32 du 7 janvier 2011 (chiropraxie). cf. Académie Nationale de Médecine, rapport, D. Bontoux, D. Couturier, C. — J. Menkès, « Thérapies complémentaires, acupuncture, hypnose, ostéopathie, tai-chi, leur place parmi les ressources de soins », 2013, p.17.

22) B. Lavaud-Legendre, « Charlatanisme et droit pénal », Les Tribunes de la santé, vol. 20, n°. 3, 2008, pp. 67-75, paragraphe 7.

23) Article L 378 du Code de la santé publique.

24) Ibid. Paragraphe 24.

25) Ibid. Paragraphe 29. « Bénédicte Lavaud-Legendre est docteur en droit et avocat. Elle intervient depuis plusieurs années dans un master de philosophie droit et médecine à l’université Michel-de-Montaigne-Bordeaux-III. Lauréate du prix Le Monde-La recherche universitaire, elle a publié en 2005 Où sont passées les bonnes mœurs ? aux PUF. »

AU SUJET DE L’AUTEUR

Auteur, conférencier et consultant, Monsieur Ettzevoglov Gerome est à l’origine du code de déontologie des praticiens en Hypnose Intégrative et du Syndicat Français des Praticiens en Hypnose Intégrative qu’il préside depuis 2018.

Il fait partie des rares experts de l’hypnose à être publié par la sélecte maison d’édition SATAS. « De l’Induction Hypnotique, Hypnose Progressive, Rapide et Instantanée », SATAS, Coll. Le Germe, Bruxelles, 2012, (Auteur G. Ettzevoglov), préfacé par les Dr Nadine MEMRAN et Dr Pierre GUTLEBEN, rencontre encore un large public dans les pays francophones et est référencé dans de nombreux travaux de recherche (mémoires et thèses de médecine et autres disciplines).

L’ensemble de ses recherches et écrits porte sur l’hypnose et ses différentes formes de langages dans les relations d’aide. Il a en outre développé des approches spécifiques de l’hypnose appliquée aux relations d’aide. Elles sont enseignées dans un organisme de formation professionnelle continue et pratiquées par différents soignants et praticiens, en France et en Europe, depuis plus d’une dizaine d’années.
Nombre de professionnels (médecins, psychiatres, psychologues, psychothérapeutes, infirmiers, dentistes, soignants et aidants de toute obédience) recommandent son travail et/ou ses écrits. En savoir plus : https://www.ettzevoglov-gerome.com

 

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