Simplification de la régularisation des médecins PADHUE
Contexte : une dépendance structurelle aux PADHUE
La France fait face à une pénurie chronique de médecins, héritage de décennies de numerus clausus restrictif et d’une désaffection pour certaines spécialités (comme la psychiatrie ou l’anesthésie-réanimation) et régions, notamment rurales ou ultramarines. Dans ce contexte, les PADHUE sont indispensables, représentant une part significative des effectifs dans les services hospitaliers sous tension. Pourtant, leurs statuts précaires et les obstacles à leur régularisation freinent leur intégration durable. Ces décrets visent à corriger ces failles systémiques.
Une voie interne pour valoriser l’expérience
Les textes introduisent une voie d’accès interne, conçue pour reconnaître l’expérience des médecins déjà en poste. Auparavant, ces soignants devaient franchir des épreuves de vérification des connaissances (EVC), suivies d’un parcours de consolidation des compétences (PCC) de deux ans en tant que praticien associé, avant d’obtenir une autorisation d’exercice définitive. Ce parcours, jugé trop sélectif, éliminait des candidats compétents pour des raisons souvent administratives. Redha Kettache témoigne :
« Dans ma spécialité, ceux qui avaient moins de 14,7 de moyenne n’ont pas été pris, malgré leur expérience »
(Le Parisien, 29 mai 2025).
Désormais, la voie interne allège ces exigences. Les médecins ne passent qu’une épreuve théorique, contre deux (théorique et pratique) pour la voie externe. Le PCC, d’une durée standard de deux ans pour les médecins (un an pour les chirurgiens-dentistes et sages-femmes), devient modulable : après six mois de stage, un responsable de structure peut demander une autorisation anticipée via un rapport cosigné par le président de la commission médicale d’établissement (CME). Ce dispositif accélère l’intégration des soignants compétents.
Mesures adaptées pour l’outre-mer
Les décrets prévoient des aménagements pour les territoires d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon), où les PADHUE compensent des pénuries critiques. Les professionnels justifiant de cinq ans d’exercice dans ces régions pourront, après réussite des EVC, demander une autorisation d’exercice directement auprès de la commission compétente, sans parcourir l’intégralité du PCC. Ce changement renforce la continuité des soins dans ces zones prioritaires.
Corriger un système inéquitable
Les PADHUE dénoncent depuis longtemps un processus de régularisation injuste. En 2024, sur 4 000 postes ouverts, seuls 3 235 candidats ont été admis sur liste principale et 638 sur liste complémentaire (Libération, 29 mai 2025).
« Des médecins compétents tiennent des services à bout de souffle, mais on leur demande de repasser des épreuves pour un demi-point manquant »,
déplore Abdelhalim Bensaïdi, vice-président de l’association Ipadecc (Libération, 29 mai 2025). Les statuts temporaires (praticien associé ou contractuel) et les démarches administratives, notamment pour les titres de séjour, aggravent leur précarité.
Ces évolutions, portées par le ministre Yannick Neuder, valorisent l’expérience des soignants et simplifient leur accès à un statut stable, répondant à une demande d’équité.
Défis pour une mise en œuvre efficace
Malgré ces avancées, des obstacles subsistent. Certains professionnels, occupant des postes à responsabilité (chefs de service, par exemple), pourraient être contraints de suivre des stages d’évaluation sur des compétences déjà maîtrisées. Rafik, PADHUE depuis trois ans, s’indigne :
« Je forme des internes, mes patients comptent sur moi… et je devrais être réévalué comme stagiaire ailleurs ? »
(RMC, 30 mai 2025). Une évaluation plus pragmatique est nécessaire pour éviter ces incohérences.
La coordination administrative reste un défi. Les médecins doivent naviguer entre le ministère de la Santé, les agences régionales de santé (ARS) et les préfectures, dans un processus souvent qualifié de « chaotique ». La nomination d’un délégué interministériel, comme suggéré par certains, pourrait fluidifier ces démarches.
Une opportunité de renforcer les effectifs hospitaliers
Ces évolutions offrent aux professionnels de santé une opportunité de renforcer les effectifs hospitaliers, notamment dans les déserts médicaux et en outre-mer. En facilitant l’intégration des PADHUE, le système de santé répond mieux aux besoins de la population tout en offrant à ces soignants une stabilité méritée. Les hôpitaux, souvent dépendants de ces médecins, gagneront en continuité des soins.
Le succès de ce dispositif repose sur une mise en œuvre rapide et équitable. Les responsables de services et les CME devront s’impliquer dans des évaluations justes, tandis qu’une communication claire et un accompagnement administratif renforcé éviteront les blocages.
Un test pour le système de santé
Les décrets du 29 mai 2025 marquent un tournant pour la reconnaissance des PADHUE, répondant à un besoin d’équité dans un système de santé sous pression. En valorisant leur expérience, la France renforce son attractivité pour les talents médicaux internationaux et consolide son offre de soins. Cependant, leur application efficace sera un test de volonté politique face à la réalité hospitalière, exigeant coordination et pragmatisme pour répondre pleinement aux attentes des soignants et des professionnels de santé.
Sources
- Le Parisien, 29 mai 2025
- Libération, 29 mai 2025
- Le Monde, 29 mai 2025
- RMC, 30 mai 2025
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