Accueil > Droit médical >

imgDans quels cas peut-on engager la responsabilité de l'hôpital ?

Rédigé par Me DURRIEU-DIEBOLT, Avocat à la Cour
  • Avant un arrêt d'Assemblée du 10 avril 1992 (époux V), on distingait suivant trois catégories de fautes :
    1. la faute lourde pour les erreurs de diagnostic et de traitement ainsi que les fautes commises lors des interventions chirurgicales,
    2. la faute simple pour les soins courants
    3. et la faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier.

  • L'arrêt susvisé du 10 avril 1992 a mis un terme à l'exigence de la faute lourde. Toutefois, la faute médicale de nature à engager la responsabilité de l'hôpital demeure une faute caractérisée, une faute spécifique. Il ne peut s'agir de n'importe quelle erreur et le juge prend toujours en considération la difficulté de l'opération, l'urgence d'une situation, les moyens de l'hôpital ...

  • Désormais, on distingue entre la faute commise par le médecin au sein de l'établissement et la faute de l'établissement dans l'organisation et le fonctionnement du service.

  • En cas de faute du médecin à l'hôpital :
    • En principe, une faute médicale commise dans un hôpital relève de la responsabilité de cet hôpital, s'il s'agit d'une faute de service : en ce cas, le médecin n'est pas personnellement responsable.
      Il convient alors d'engager la responsabilité de l'hôpital devant les tribunaux administratifs.
      Exemples de responsabilité hospitalière du fait d'une faute médicale :
      • Erreurs techniques : ablation trop importante (CAA Paris 22/9/98 LYSCAR), pose d'un cathéter jugulaire dans l'artère carotide droite (CE 30/6/99, LACHAUD), non respect des règles de l'art dans l'injection d'un corticoïde (CAA Bordeaux 15/2/99 CAUHAPE).
      • Méconnaissance, au cours d'une séance de dilatation de l'oesophage, des règles habituelles d'emploi des sondes utilisées (CAA Nantes, 30 octobre 1997 ).
      • Retard dans la décision médicale de transférer un nouveau-né vers un service spécialisé en matière néonatale (CAA Nantes, 7 mars 1997)
      • Retard ou erreur de diagnostic : décision de la cour administrative d'appel de Nancy du 4 mai 1999 MERLY, et du tribunal administratif de Rennes 16 juin 1999 WATRIN. Le juge administratif apprécie les conditions et les difficultés de l'établissement du diagnostic pour déterminer si il y a faute médicale ou non.
      • Erreur de choix thérapeutique (CAA Nancy, 3/12/98 CH Valenciennes).

    • Exceptions à la responsabilité de l'hôpital en cas de faute médicale :
      • Si le médecin exerce en secteur privé de l'hôpital :
        • si le dommage est dû à un défaut d'organisation ou de fonctionnement ou à une faute du personnel, la responsabilité de l'hôpital peut être engagée.
        • Mais si le préjudice est du à l'acte médical, le médecin est responsable.
      • Si le médecin exerce en secteur public de l'hôpital :
        • Le médecin est responsable s'il a commis "une faute personnelle détachable du service".
        • Il s'agit d'une faute "qui relève un manquement inexcusable à des obligations d'ordre professionnel et déontologique" (Cour de cassation, 2 avril 1992).
        • Exemples : refus de soigner un patient, retard dans l'intervention ...
        • Si la faute a été commise à l'occasion du service ou si le service a fourni l'instrument du dommage, le patient a le choix entre poursuivre le médecin ou l'hôpital.
        • Cliquer ici pour avoir des renseignements sur la procédure civile ou pénale en cas de responsabilité du médecin.

  • En cas de faute de l'hôpital :
    • En principe, il faut prouver une faute dans lorganisation ou le fonctionnement du service public hospitalier. Il s'agit d'une faute caractérisée, une faute spécifique. Le défaut de surveillance est fréquemment invoqué par les victimes. à cet égard, l'obligation de surveillance s'impose durant toute la durée de l'hospitalisation et parfois même au delà.
      • défaut de surveillance d'un patient installé sur un matelas chauffant défaillant (reponsabilité partagée avec le fabricant de matelas, CAA Paris 18 mai 1999, CORREIA).
      • défaut de surveillance obstétricale dune patiente dont laccouchement par césarienne avait été différé de 3 heures, pour une autre urgence, alors quil sagissait dune grossesse à haut risque (CAA Lyon 20 mars 1997)
      • défaut de surveillance dans un service psychiatrique ( CAA Paris 11 juillet 1997)
      • défaut de surveillance d'une personne âgée avec diabète, insuffisance coronarienne, hypertension, troubles locomoteurs, cataracte...qui s'était cassé le col du fémur à l'hôpital en tombant sur le sol ; la victime aurait dû faire l'objet d'une surveillance particulière (CAA Nancy 4 mai 1999 MIRAGLIA)
      • Un centre hospitalier public doit hospitaliser un patient, même en surnombre, dans le service spécialisé que nécessite son état (CE, n°196255, 16/6/00).
      • Cependant, le juge administratif ne retient pas la responsabilité de l'établissement lorsque l'état de la victime ne laissait pas présager des événements aussi graves que par exemple une tentative de suicide (CE 29 janvier 1999, Dame TRIMMEL) ou un incendie volontaire (CAA Bordeaux, 5/7/99, SA La Préservatrice foncière assurances TIARD).
      • Dès lors que les patients présentent des signes d'agitation ou de déséquilibre, les établissements, même non spécialisés en psychiatrie, sont tenus d'une obligation de surveillance. (CAA Bordeaux 8 mars 1999 , consorts JANOTA et CAA Lyon 22 juin 1999 SILVESTRE).
      • De manière générale, le juge vérifie concrètement que " compte tenu des moyens techniques et du personnel médical dont dispose l'établissement, le malade a reçu tous les soins qui pouvaient être pratiqués et a été suivi par des médecins qualifiés pour traiter son affection " (Conseil d'état, 23 avril 1997, veuve MARUT)
    • Présomption de faute : Dans de rares cas, notamment en matière d'infections nosocomiales, la faute de l'établissement peut être présumée.

  • Présomption de faute ou responsabilité sans faute de l'hôpital : Dans les cas suivants, il nest pas nécessaire de rapporter la preuve dune faute.
  • En matière dinformation du patient (notamment arrêts du CE 5/1/2000). Ce fondement permet une indemnisation plus large des patients qui ont du mal à trouver une véritable faute médicale. Lobligation dinformation servant en ce cas de prétexte à lindemnisation.
  • Lorsque les conséquences dommageables d'un acte de soin sont disproportionnées par rapport au caractère banal et bénin de cet acte (par exemple pour un cas de paralysie suite à une piqûre, Conseil d'Etat 23 février 1962, MEIER )
  • Lorsque le dommage est inexplicable. Il révèle alors un fonctionnement défectueux du service public (par exemple pour un rapt de bébé dans une maternité, Conseil d'Etat 9 juillet 1969 , époux PECH ; ou des brûlures après une opération, Conseil d'état, 1er mars 1989, époux PEYRES)
  • En cas de contamination par transfusion : la responsabilité en matière de transfusions.
  • La loi du 19 mai 1998 a consacré une responsabilité de plein droit à la charge des fabricants et des fournisseurs de produits défectueux.
  • Par contre l'arrêt GOMEZ est désormais caduque (depuis la loi du 4 mars 2002 qui pose clairement le principe de la responsabilité pour faute) En cas d'utilisation d'une thérapeutique nouvelle : CA Lyon 21/12/90 arrêt GOMEZ " l'utilisation d'une théapeutique nouvelle crée, lorsque ses conséquences ne sont pas encore entièrement connues, un risque spécial pour les malades qui en sont l'objet ; que lorsque le recours à une telle thérapeutique ne s'impose pas pour des raisons vitales, les complications exceptionnelles et anormalement graves qui en sont la conséquence directe engagent même en l'absence de faute, la responsabilité du service public hospitalier. "
  • De même de l'arrêt BIANCHI, en cas de création d'un risque exceptionnel : décision dAssemblée du Conseil dEtat du 9 avril 1993 arrêt BIANCHI " lorsquun acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont lexistence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si lexécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec létat initial du patient comme avec lévolution prévisible de cet état, et présentant un caractère dextrême gravité".

Cabinet
2, rue du Bouloi
75001 PARIS
Tel : 01 42 71 56 10
Fax : 01 42 71 56 50
www.sosdroit.org
Mail : cabinet.durrieu@free.fr

img img img
 

Les +