Cannabis et troubles cognitifs : quelle relation ?

La consommation de cannabis perturbe sur le long terme les fonctions de mémoire et d'attention. Une nouvelle étude montre que ces troubles cognitifs persistent au-delà de la période qui suit immédiatement la consommation et ils semblent s'intensifier avec le nombre d'années de consommation.

Cette étude est publiée aujourd'hui dans le Journal of American Medical Association. Pour cette étude, Nadia Solowij et ses collaborateurs ont étudié trois groupes différents de patients entre 1997 et 2000.

Les auteurs ont comparé les fonctions cognitives chez les consommateurs quasi-quotidiens de cannabis : 51 en consommaient depuis longtemps et 51 depuis moins de temps. Un groupe témoin était composé de 33 non consommateurs.

Neuf tests neuropsychologiques ont été utilisés pour mesurer l'attention, la mémoire et les autres fonctions cognitives des participants. Ils étaient réalisés en moyenne après 17 heures d'abstinence.

Les participants du premier groupe avec une moyenne de 24 ans de consommation régulière de cannabis ont eu de moins bons résultats aux tests de mémoire et d'attention que les sujets témoins ou ceux du groupe avec une durée de consommation moyenne de 10 ans.

Ceux avec le plus long passé cannabique avaient de moins bons résultats que les deux autres groupes. Entre les témoins et ceux qui consommaient du cannabis depuis 10 ans en moyenne, les résultats étaient similaires pour certains tests tandis qu'ils étaient en défaveur du cannabis pour d'autres critères d'évaluation.

"Les mesures des performances étaient souvent significativement corrélées à la durée de l'utilisation du cannabis, en étant moins bonnes avec l'augmentation des années d'utilisation", expliquent les chercheurs. Par ailleurs, ces mesures n'étaient pas corrélées à la présence de symptômes de manque et les différences restaient significatives si l'on prenait en compte la consommation récente de cannabis ou d'autres drogues.

D'après les auteurs, ces résultats confirment des résultats précédents sur les conséquences du cannabis chez les gros consommateurs réguliers. Ils ajoutent que l'effet de l'arrêt du cannabis sur le rétablissement de ces fonctions cognitives reste à étudier.

Un éditorial rédigé par Harrison Pope (Harvard Medical School) revient sur cette étude. Le Dr Pope estime quant à lui que ces résultats doivent être interprétés avec précaution si l'on considère d'autres travaux récents sur le sujet.

"Par exemple, une récente méta-analyse des études neuropsychologiques sur les consommateurs de cannabis sur le long terme a trouvé qu'il n'y avait pas de preuve significative de déficit pour sept domaines d'habileté neuropsychologique sur huit, et seulement un petit effet pour le domaine d'apprentissage restant", écrit le Dr Pope. Il ajoute enfin que l'étude ne permet de savoir si ces troubles persistent après plusieurs semaines ou plusieurs mois d'abstinence.

Toujours dans le domaine des drogues illicites, on peut rappeler l'avis récent de l'Académie de médicine qui s'est prononcée contre "toute banalisation de la consommation de cannabis". (voir dépêche Caducée.net)

Source : JAMA 2002;287:1123-31, 1172-4.

SR

Descripteur MESH : Troubles cognitifs , Cannabis , Attention , Mémoire , Apprentissage , Éditorial , Patients , Temps , Tests neuropsychologiques

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