Café et grossesse : risque d’avortement spontané au-delà de 6 tasses

La probabilité est faible qu’une consommation modérée de caféine augmente le risque d’avortement spontané, montre une étude américaine publiée dans le New England Journal of Medicine. En revanche, ce risque existe, en particulier au cours du deuxième trimestre de la grossesse, lorsque les concentrations sériques maternelles de paraxanthine, métabolite principal de la caféine, sont particulièrement élevées, équivalentes à une consommation de plus de 6 tasses de café américain par jour (600 mg de caféine).

Le Dr Mark Klebanoff et ses collaborateurs de la division épidémiologie du National Institute of Child Heath and Human Development ont entrepris une étude cas-témoins.

Ces investigateurs ont mesuré la paraxanthine sérique chez 591 femmes qui avaient fait un avortement spontanéà moins de 140 jours de gestation et chez 2.558 femmes appariées de la même clinique ayant donné naissance à des enfants vivants à 28 semaines ou plus de gestation. La prise de sang eut lieu le même jour que les femmes qui ont fait une fausse-couche.

Les femmes qui ont participéà cette étude ont été incluses dans le Collaborative Perintal Project entre 1959 et 1966, la paraxanthine ayant été mesurée presque 30 ans plus tard par chromatographie liquide haute performance (HPLC) plus tard à partir d’échantillons de sérums conservés à très basses températures.

Les résultats montrent que " la concentration sérique de paraxanthine est plus élevée chez les femmes qui ont fait un avortement spontané que les celles qui ont naissance à un enfant vivant. Ce risque ne s’élève cependant que lorsque les concentrations sériques de paraxanthine atteignent des valeurs extrêmement élevées ".

Ainsi, l’odds ratio pour un avortement spontané n’était pas significativement élevé chez les femmes ayant une concentration sérique de paraxanthine de 1.845 ng/ml ou moins, ce qui correspondait au 95e percentile des femmes appariées.En revanche, l’odds ratio ajusté pour un avortement spontané chez les femmes ayant des concentrations de paraxanthine sérique supérieures à 1.845 ng/ml était de 1,9 par rapport à celles qui avaient des taux de paraxanthine de 50 ng/ml [IC 95% : 1,2-2,8].

Est-ce pour autant que le café aux doses habituelles est sûr chez la femme enceinte, s’interroge Brenda Eskenazi, chercheur à l’Ecole de santé publique de l’Université de San francisco. dans un éditorial accompagnant l’article.

Elle rappelle que les effets les plus évidents du café chez les femmes adultes non enceintes sont d’ordre cardiovasculaire et neuro-comportemental. La caféine et ses métabolites agissant en effet, après passage de la barrière hémato-méningée, sur les récepteurs adénosine A1 et A2A, ce qui entraîne des effets secondaires sur plusieurs classes de neurotransmetteurs.

Par ailleurs, la caféine traverse facilement le placenta, se retrouve dans le lait maternel, a une demi-vie augmentée au cours de la grossesse (jusqu’à 11 heures en fin de grossesse) et chez les nouveau-nés (jusqu’à 100 heures), les fœtus et bébés de petite taille, les prématurés, l’impossibilité du fœtus et du nouveau-néà détoxifier la caféine. De plus, des changements dans le rythme cardiaque et respiratoire fœtal ont été observés même en cas de consommation modérée de caféine.

Brenda Eskenazi souligne également que la caféine peut potentialiser les effets tératogènes et indésirables de diverses substances, comme l’alcool, la nicotine et certains médicaments comme les vasoconstricteurs. Sans compter, ajoute-t-elle, que les nouveau-nés avec statut nutritionnel précaire peuvent être particulièrement sensibles aux effets conjugués neurochimiques et neuro-comportementaux de la caféine.

Et de conclure, qu’aux Etats-Unis, un étiquetage des aliments contenant de la caféine serait une mesure appropriée pour éduquer dans un premier temps le public. En attendant, les professionnels de santé devraient " continuer à conseiller aux femmes enceintes et celles qui allaitent de limiter leur consommation de caféine ".

Source : N Engl J Med, 1999, 341: 1639-44 et 1688-89.

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