Cancer : un actinomycète génétiquement modifié producteur d'un agent anti-microtubules

La production d'un anticancéreux naturel prometteur, l'épothilone, serait bientôt possible grâce au génie génétique. Une équipe américaine rapporte avoir réussi à faire produire cet agent anti-microtubules par un actinomycète génétiquement modifié. Jusqu'à présent, l'épothilone était extraite en très faible quantité d'un autre microorganisme. Ce système d'expression hétérologue pourrait permettre, après optimisation, d'obtenir suffisamment d'épothilone pour débuter des essais cliniques.

L'épothilone est un agent anticancéreux potentiel produit par une myxobactérie, Sorangium cellulosum, dont le mode d'action sur les microtubules est similaire à celui du taxol. Cette molécule présente une activité cytotoxique sur des tumeurs résistantes au taxol. De plus, sa meilleure solublité dans l'eau lui permet d'être utilisée sans addition d'agents solubilisants délétères.

Cependant, la production d'épothilone à grande échelle à partir de S.cellulosum est fortement compromise par un temps de génération trop long (temps de doublement de 16 h) et une quantité trop faible de produit synthétisé (20 mg/l).

Des chercheurs de la firme Kosan Biosciences (Hayward, USA) indiquent dans Science avoir réussi à cloner à partir de S.cellulosum un groupe de gènes (gene cluster) codant l'enzyme PKS responsable de la production d'épothilone (PKS pour polyketide synthase).

L'enzyme PKS assure la synthèse des épothilones A, B, C et D. C’est l'épothilone D, produite en quantité extrêmement faible, qui possède néanmoins la plus haute activité thérapeutique.

Les chercheurs ont introduit ce cluster de gènes dans Streptomyces coelicolor, un actinomycète d'utilisation plus souple que la bactérie S.cellulosum car il se multiplie dix fois plus rapidement et facilement manipulable génétiquement. Ce système d'expression hétérologue de l'enzyme PKS s'est révèlé fonctionnel et a permis la production d'épothilone A et B. La production des épothilones C et D a également été rendue possible par modification d'un des gènes du cluster.

Selon les auteurs, le faible temps de génération de S.coelicolor et l'optimisation du système d'expression devraient permettre d’obtenir des quantités d'épothilone compatibles avec la mise en place d'essais cliniques. Ce système d'expression pourrait également servir à produire, par modification des gènes du cluster, des analogues d'épothilone potentiellement très actifs.

Source : Science, 28 Janvier 2000, Vol.287, 640-42.

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