La forme infectieuse du prion peut fixer le plasminogène

Des chercheurs suisses et autrichiens viennent de démontrer que la forme pathogène de la protéine prion (PrPSc) peut se lier au plasminogène. Cette interaction PrPSc/plasminogène est spécifique et permet de distinguer la forme pathogène PrPSc de la forme native non infectieuse PrPC. Cette propriété pourrait être utilisée comme outil diagnostique. Néanmoins, ces travaux ne prouvent pas que le plasminogène soit un ligand qui participe in vivo aux mécanismes conduisant à la maladie.

Ce résultat, présenté par Fisher et al dans la revue Nature du 23 novembre, revêt une importance particulière en raison de ses conséquences éventuelles sur le diagnostic de la maladie. En effet, le plasminogène est le premier facteur endogène qui permet de distinguer efficacement la forme PrPSc de la forme PrPC. Ces deux formes ne diffèrent que par leur structure spatiale.

La forme PrPSc est connue pour son interaction avec la forme native PrPC. Selon la théorie développée par Stanley Prusiner (qui lui a valu le prix Nobel de Physiologie et Médecine en 1997), PrPSc interagit avec PrPC et induit un changement de conformation de PrPC qui prend alors la "forme" PrPSc.

Cette théorie comporte certaines limitations, notamment parce qu'elle n'explique pas complètement les mécanismes qui conduisent à la maladie. Comme le soulignent Fisher et al dans leur publication, "le dépôt de PrPSc seul ne suffit pas à causer une neuropathie, PrPSc endommage vraisemblablement le cerveau en interagissant avec d'autres constituants cellulaires".

Ces auteurs ont orienté leur recherche vers les constituants du sérum de souris ou humain. Ils ont utilisé des billes couplées à des protéines sériques. Ils ont incubé ces billes dans des préparations contenant séparément les diverses formes de la protéine prion. Leurs travaux ont ainsi montré que le plasminogène pouvait se lier de façon spécifique à la forme PrPSc mais pas à la forme PrPC.

De plus, les billes "porteuses" de l'association PrPSc/plasminogène entraînent une neuropathie (scrapie ou tremblante) lorsqu'elles sont implantées chez des souris.

Une analyse affinée a montré que l'interaction entre le plasminogène et PrPSc se faisait vraisemblablement par des résidus lysine de PrPSc. Cette information est d'importance, car l'on sait que le gène PrP présente un polymorphisme particulier sur le codon 219. Ce polymorphisme correspond à une lysine ou un acide glutamique en position 219. La présence d'une lysine est connue pour sa capacité à protéger de la maladie, probablement en perturbant la fixation de PrPSc avec une protéine nommée "protéine X", jusqu'alors non identifiée. Selon les auteurs, la protéine X pourrait être le plasminogène.

Quel peut être le rôle éventuel de cette association dans la pathogenèse de la maladie ? Fisher et al soulignent que le plasmine, qui résulte du clivage du plasminogène, a été impliqué dans l'organisation synaptique. La présence de PrPSc pourrait interférer avec cette fonction. Cette hypothèse est intéressante car on a récemment montré que la protéine PrPC pouvait être impliquée dans la modulation des fonctions neuronales (Mouillet-Richard et al. Science 2000;289:1925-1928. voir dépêche du 15/09/2000).

En plus de son application éventuelle pour le diagnostic, ce résultat "pourrait être aussi utile pour améliorer l'élimination du prion dans les produits dérivés du sang", selon les termes des chercheurs. Cependant, l'infectiosité des produits sanguins contaminée par le prion n'est pas totalement confirmée.

Source : Nature 2000;408:479-483

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