Un vaccin antivariolique pour tous les Américains ?

La crainte d'une attaque bioterroriste par le virus de la variole a conduit les autorités américaines à s'assurer qu'elles pouvaient rapidement disposer d'un stock suffisant de vaccin pour l'ensemble de la population. D'après de nouvelles études, le stock actuel de 15 millions de doses pourrait donc facilement passer à 75 millions grâce à des dilutions des préparations vaccinales. Par ailleurs, la production de vaccin de deuxième génération augmentera le stock global jusqu'à 286 millions de doses d'ici fin 2002. Dans ce contexte, l'évaluation du risque et des stratégies vaccinales à adopter est essentielle.

Les dernières informations rendues publiques sur les stocks de vaccins antivarioliques semblent mettre définitivement les Etats-Unis à l'abri d'un désastre sanitaire dans l'hypothèse d'un emploi de la variole à des fins terroristes.

Le dernier cas naturel de variole a été observé en Somalie en 1977. Les Etats-Unis ont décidé de suspendre la vaccination de routine en 1971, une décision évidente au vu des données épidémiologiques de l'époque. Cette décision, prise également par de nombreux pays, a conduit à une réduction marquée des stocks de vaccins disponibles. Pour faire face à une épidémie terroriste de variole, le gouvernement américain a donc décidé d'augmenter son stock.

Deux stratégies ont été mises en œuvre à cet effet. La première résidait sur l'achat de nouveaux vaccins. Le Département américain de la Santé (U.S. Department of Health and Human Services, HHS) a passé un contrat avec Acambis Inc pour fournir 209 millions de doses avant la fin de l'année.

Parallèlement, il a été proposé que les vaccins déjà disponibles soient dilués pour augmenter le nombre de doses. Deux études qui seront publiées dans le New England Journal of Medicine du 25 avril démontrent la faisabilité de cette approche. Selon les résultats de ces essais, une dilution des doses par cinq ou par 10 ne modifie par l'efficacité de façon significative. La dilution par cinq serait toutefois préférable.

"Les conséquences en santé publique de cette étude ont une importance énorme", a déclaré Tommy Thompson, secrétaire du HHS. "Nous savons que dans le cas éventuel d'une libération internationale de la variole, notre stock de vaccin peut être multiplié par cinq comme nous l'avions prévu".

Le problème de la disponibilité des doses paraît donc réglé ou le sera dans les prochains mois. Le débat sur la variole doit désormais évoluer vers la question suivante : que faire de ces doses ? Initier une vaccination systématique de la population ou adopter une attitude plus "prudente" en attendant l'arrivée éventuelle d'une épidémie ?

Les avis Outre-Atlantique semblent partagés. Dans un éditorial du NEJM, le Dr Anthony Fauci (Directeur du National Institute of Allergy and Infectious Diseases) rappelle que le risque d'épidémie "est vraisemblablement très faible" mais que la menace reste réelle. Pour parer à l'épidémie, les CDC d'Atlanta (Centers for Disease Control and Prevention) recommandent une vaccination "en anneau" (centrée sur les personnes infectées et leur entourage) mais pas une vaccination de masse.

Il est évident qu'une vaccination de toute la population réglerait définitivement le problème mais, comme le souligne A. Fauci, ces vaccinations ne sont pas sans risques. Les effets indésirables du vaccin sont relativement fréquents et peuvent même conduire au décès. Malgré ces risques, le Dr Jeffrey Drazen explique dans le NEJM que la population américaine "acceptera ces risques avec courage" si cette solution de masse étant retenue.

Selon Fauci, seul le dialogue permettra de satisfaire à la fois les intentions individuelles et les impératifs de santé publique du gouvernement. A ce titre, il est urgent que le gouvernement expose à la population les avantages et inconvénients d'une vaccination universelle et volontaire, tout en rappelant les bases du plan de vaccination en anneau proposé par les CDC. Fauci rappelle enfin que le dernier cas de variole aux Etats-Unis remontre à 1949 et que des souches virales de la variole sont conservées officiellement par les CDC à Atlanta et par un laboratoire russe près de Novossibirsk.

Source : N Engl J Med 2002, numéro du 25 avril 2002. Articles déjà disponibles sur le site www.nejm.org.

SR

Descripteur MESH : Vaccin antivariolique , Variole , Population , Risque , Virus de la variole , Virus , Vaccination , Vaccins , Gouvernement , Santé , Santé publique , Savons , Somalie , Attitude , Personnes , Vaccination de masse , Face , Essais , Emploi , Éditorial

Recherche scientifique: Les +