Trypanosomiase Humaine Africaine : caractérisation d'une nouvelle voie métabolique comme cible thérapeutique

Des chercheurs américains viennent de démontrer que les formes sanguines de Trypanosoma brucei peuvent synthétiser des acides gras. Le produit majeur de cette synthèse de novo est le myristate. Ce myristate est préférentiellement incorporé dans des "ancres GPI" qui assurent la fixation des glycoprotéines du manteau. Cette voie métalolique, jusqu'alors inconnue, constitue un cible thérapeutique potentielle.

Ces travaux ont été réalisés par l'équipe de Paul Englund de la Johns Hopkins Medical School à Baltimore. Les résulats de ces recherches viennent d'être publiés dans le numéro de Science de cette semaine.

Trypanosoma brucei est l'agent pathogène de la Trypanosomiase Humaine Africaine (THA) ou maladie du sommeil. Le Dr Englund rappelle dans un communiqué de presse de son Université "qu'il n'existe pas de 'bonnes molécules' pour traiter la maladie", certaines étant extrèmement toxiques. La grande variabilité des glycoprotéines du manteau rend impossible l'élaboration d'un vaccin. Cette variabilité permet également au parasite d'échapper au système immunitaire de l'hôte.

On sait depuis plusieurs années que les glycoprotéines du manteau sont fixées grâce à des "ancres GPI" (glycosyl phosphatidylinositol anchors). Ces ancres GPI sont constituées de myristate. Or, cet acide gras n'est pas présent en quantité suffisante dans le sang de l'hôte pour assurer son incorporation par le parasite. De plus, on considérait jusqu'à présent que la forme sanguine du Trypanosome était incapable de synthétiser le myristate. Le Dr Englund et ses collaborateurs viennent de démontrer le contraire.

En utilisant des marquages radioactifs, les chercheurs ont pu démontrer que les formes sanguines du Trypanosome pouvaient synthétiser des acides gras, la synthèse étant orientée préférentiellement vers la production de myristate. Ce myristate synthétisé de novo est essentiellement incorporé dans les ancres GPI.

Les auteurs ont évalué l'effet de la thiolactomycine sur cette synthèse. Cet antibiotique inhibe une des étapes de la synthèse d'acides gras chez les procaryotes mais pas chez les eucaryotes. In vitro, la thiolactomycine inhibe la synthèse d'acides gras chez le Trypanosome avec une IC 50 = 150 µM. Par ailleurs, l'antibiotique à cette même concentration inhibe la croissance du parasite en culture ce qui indique que la cible de la thiolactomycine est vraisemblement une enzyme responsable de la synthèse d'acides gras ou 'fatty acid synthetase'.

Les auteurs précisent que la myristoylation du GPI n'existe pas chez les eucaryotes. De ce fait, cette voie métabolique pourrait être une cible thérapeutique importante notamment par l'utilisation d'inhibiteurs de la synthèse d'acides gras tels que la thiolactomycine.

Cependant, la cible de la thiolactomycine chez le trypanosome reste à identifier. La caractérisation de cette enzyme devrait faciliter la mise au point d'inhibiteurs.

Source: Nature 2000; 288: 140-43. Communiqué de presse : Johns Hopkins Medical Institutions

Descripteur MESH : Acides , Acides gras , Glycoprotéines , Thérapeutique , Eucaryotes , Maladie , Baltimore , Croissance , In vitro , Nature , Sang , Science , Sommeil , Système immunitaire , Toxiques , Trypanosomiase

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