Des myoblastes pour réparer le myocarde

Dans le cadre des séminaires du Généthon, Jean-Thomas Vilquin (Institut de Myologie, Pitié Salpetrière, Paris) est venu parler des premiers essais pré-cliniques sur l’homme, d’autogreffes de myoblastes dans le muscle cardiaque chez des patients souffrant d’insuffisance cardiaque post-ischémique (infarctus du myocarde). Le premier patient greffé, dont l’essai avait déjà fait l’objet d’une publication l’année passée dans le Lancet, montrait un recouvrement de la fonction contractile dans la zone infarcie cinq mois après la greffe. Depuis, neuf autres patients ont été inclus dans un essai thérapeutique préclinique de phase I/II et il semble qu’en moyenne (mais ce sont des résultats préliminaires non encore publiés), plus de la moitié des zones lésées aient retrouvé une fonction contractile et une activité métabolique.

L’insuffisance cardiaque (120000 nouveaux cas par an en France), souvent d’origine ischémique, est un vrai problème de santé publique, et nombreux sont les patients qui, réfractaires aux thérapies médicamenteuses ou n’ayant pas eu la chance de bénéficier d’une transplantation cardiaque (300 greffes par an), en meurent.

Dans la recherche d’options thérapeutiques alternatives, la greffe cellulaire pour remplacer les cardiomyocytes perdus au cours d’un événement cardiaque de type ischémique, s’inscrit dans ce qu’on appelle aujourd’hui la médecine régénératrice, très en vogue actuellement avec l’explosion des cellules souches.

«Les myoblastes sont peut-être des cellules souches», a d’ailleurs commenté le docteur Vilquin, en parlant de l’apparente plasticité de ces cellules qui peuvent, in vitro ou in vivo lorsqu’elles sont injectées dans un organe comme le cœur, se différencier en myotubes puis en fibres musculaires, pour adopter les fonctions de cellules environnantes.

Les myoblastes sont des cellules satellites situées en périphérie de la fibre musculaire, juste sous la membrane basale du muscle. Normalement quiescents à l’état normal, ils ont la capacité de pouvoir se mobiliser rapidement lors d’un traumatisme et de proliférer rapidement pour ensuite fusionner et reformer les fibres musculaires lésées.

L’idée de l’équipe du professeur Ménasché avec qui a travaillé J-T Vilquin sur le premier cas d’autogreffe de myoblastes chez un patient souffrant d’une insuffisance cardiaque congestive sévère (Lancet, 27 janvier 2001;357), était d’injecter à l’aide d’une micro-aiguille au site de la zone lésée par l’accident d’origine ischémique, des myoblastes préalablement prélevés sur le muscle de la cuisse des patients et cultivés in vitro afin de les amplifier en quantité suffisante avant leur réimplantation.

Les avantages de la technique sont que celle-ci n’entraîne pas de rejet immunologique (greffes autologue) et que le prélèvement (biopsie musculaire sous anesthésie locale) et la culture des myoblastes (sous hotte stérile) sont relativement facile à pratiquer, avec une pureté d’obtention des cellules de plus de 90% et une assurance qu’elles ne se différencient pas en cartilage, en tissu fibreux ou en os.

Sans entrer dans les détails des essais cliniques (les résultats sont soumis à publication) J-T Vilquin a tout de même montré des preuves expérimentales de la réussite de la technique, avec notamment un recouvrement de la fonction des segments infarcis (déterminée en autres par échographie, IRM et PET-Scan) de plus de 59%, contre en moyenne 10% lors d’un infarctus du myocarde après un pontage coronarien.

Les zones implantées avec les myoblastes semblent retrouver un pouvoir contractile et aucune complication opératoire immédiate n’a été observée (un des patients sur les 10 traités est décédé des suites opératoires, mais sa mort serait due à la gravité de son état qui montrait un stade IV d’insuffisance cardiaque avec refus de greffe cardiaque).

Si les résultats sont publiés, des essais cliniques pour cette fois-ci évaluer l’efficacité de la technique (300 patients sont prévus, il s’agissait ici d’une phase préclinique pour évaluer la sécurité et l’approche expérimentale de la technique) seront lancés.

Le chercheur voit des applications plus larges à cette technique de médecine régénératrice, en faisant allusion notamment aux cardiomyopathies dilatées non ischémiques ou aux myopathies impliquant des zones limitées à traiter, comme la dystrophie musculaire facio-scapulo humérale.

Source : Généthon, Evry, le 10 avril 2002

PI

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