Le ciblage par dégradation, une nouvelle piste pour soigner les leucémies ?

Utilisés avec succès pour traiter les leucémies aiguës promyélocytaires, l'acide rétinoïque et l'oxyde d'arsenic induisent la différenciation des cellules malignes. Cette différenciation est-elle responsable de l'éradication de la maladie ? Les chercheurs d'une unité CNRS / Université Paris Diderot, située au sein de l'Hôpital Saint-Louis, sont parvenus à prouver que tel n'était pas le cas : les rémissions sont surtout liées à la disparition des cellules souches malignes à l'origine de la leucémie. L'équipe du professeur Hugues de Thé vient d'établir que cette disparition induite par le traitement est provoquée par la dégradation spécifique de la protéine responsable de cette pathologie. Ce ciblage thérapeutique constitue une piste prometteuse qui pourrait s'étendre à d'autres types de leucémies. Soutenus par la Ligue contre le cancer et par l'Institut national du cancer, ces travaux viennent d'être publiés sur le site Internet de la revue Nature Medicine.

La leucémie aïgue promyélocytaire (LAP) est marquée par un excès de cellules immatures et malignes. Cette forme rare de leucémie est la conséquence d'une translocation chromosomique, retrouvée uniquement dans les cellules leucémiques. Cette anomalie chromosomique entraîne la production d'une protéine de fusion appelée PML-RAR. Issue des gènes PML (1) et RAR (2), cette protéine de fusion est à l'origine de la pathologie. Elle bloque la différenciation des promyélocytes qui restent immatures. Incapables alors de disparaître naturellement, les cellules malignes s'accumulent dans la mœlle osseuse et le sang.Il existe aujourd'hui deux agents particulièrement efficaces pour traiter les LAP : une hormone, l'acide rétinoïque et un poison, l'oxyde d'arsenic. Déjà utilisés depuis des années, ils conduisent à des rémissions chez les malades. Jusqu'à présent, ce succès s'expliquait par le fait que ces drogues induisaient la différenciation des cellules malignes en cellules différenciées normales, qui finissaient par mourir. Avec pour conséquence de normaliser l'état de la moelle osseuse. Mais cette différenciation pouvait-elle expliquer les guérisons obtenues ?C'est en modélisant la réponse de ces deux agents que l'équipe dirigée par Hugues de Thé (3) y a en partie répondu. Les chercheurs ont ainsi révélé que le traitement de la LAP par ces médicaments entraîne non seulement la différenciation des cellules leucémiques mais surtout la disparition des cellules souches malignes responsable de la leucémie. Cette éradication est causée par la dégradation de la protéine de fusion PML-RAR, elle-même provoquée par une action coopérative des deux drogues. Cibler la destruction de cette protéine s'avère donc une stratégie de choix pour anéantir les cellules souches leucémiques.Ces travaux constituent un exemple remarquable de ciblage thérapeutique d'une protéine responsable d'un cancer. Ils démontrent qu'il est possible de détruire spécifiquement des cellules souches cancéreuses en induisant la dégradation des protéines responsables de leur survie. Ce nouveau concept pourrait s'étendre à d'autres types de leucémies.

Descripteur MESH : Leucémies , Cellules , Cellules souches , Arsenic , Thé , Thérapeutique , Internet , Maladie , Nature , Paris , Gènes , Moelle osseuse , Protéine S , Protéines , Sang , Survie

Recherche scientifique: Les +