DISPARITES DES PRESCRIPTIONS MEDICALES : Synthèse des connaissances et point sur les actions

Les dépenses de prescriptions médicales connaissent parfois de fortes disparités géographiques qui ne semblent s’expliquer ni par le profil des patients, ni par les caractéristiques de l’offre locale de soins. La compréhension de ces disparités et leur réduction quand elles s’avèrent injustifiées constituent un enjeu important pour l’Assurance Maladie. Une étude de la caisse nationale publiée en avril dernier évaluait l’impact de ces sur-prescriptions entre 2 et 2,5 milliards d’euros par an, dont la moitié pour le seul poste des médicaments.

On ne peut comprendre ces disparités que sur le terrain, au plus proche des acteurs de la santé. C’est également à ce niveau qu’on peut éventuellement agir. C’est tout le sens de la mobilisation demandée au réseau local de l’Assurance Maladie. Analyse détaillée de ces disparités et point de situation sur les actions menées.

En France, toutes catégories de prescriptions* confondues, le co ût de prescription des généralistes s’élève en moyenne à 80 euros. Un quart des généralistes prescrit pour moins de 64 euros par consultation, mais un autre quart prescrit pour plus de 91 euros (soit presque moitié plus), sans que cette différence ne s’explique par une différence de clientèle. (point de conjoncture n° 25, mai 2004).

Ces disparités concernent au premier titre les médicaments (point de conjoncture n°26-27, juillet 2004). Le montant moyen des prescriptions de médicaments des médecins généralistes s’élève à 52 € par consultation mais 25 % prescrivent pour 42 € en moyenne et 25% prescrivent pour 60 € . Ces prescriptions semblent liées à des pratiques médicales ou des habitudes particulières, plus qu’à des facteurs objectifs comme les caractéristiques des patients. Ces sur-prescriptions apparaissent en effet beaucoup plus fréquentes dans certaines zones géographiques : -dans 9 départements (Creuse, Indre, Cher, Nièvre, Yonne, Saône et Loire, Loire, Aube,

Orne), cette forte prescription concerne une partie importante des médecins et relève donc plutôt d’un comportement collectif. Il reste à analyser les raisons de ce type de comportement qui ne s’explique pas par l’environnement local. Rappelons que ce phénomène de très fortes prescriptions n’est pas observé dans des départements ruraux similaires. -Dans 3 départements (Paris, les deux départements d’Alsace et les Alpes de Haute-Provence), cette forte prescription est le fait de quelques médecins isolés alors que le montant des prescriptions de leurs confrères est proche de la moyenne.

*L’étude porte essentiellement sur les dépenses de prescriptions de soins (soit environ 35 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes d’assurance maladie)..

Des disparités géographiques sans raison médicale évidente

Depuis leur lancement en France en 1999, la « part de marché » du générique varie fortement d’un département à l’autre (Point de conjoncture n° 28, ao ût 2004) Le classement des départements les plus consommateurs de génériques a peu évolué. Paris et la Corse demeurent les départements les moins consommateurs. L’analyse approfondie des caractéristiques des professionnels de santé (médecin prescripteur et pharmacie) et des patients révèle trois caractéristiques de sous-consommation que l’on retrouve dans ces départements de queue de peloton : -les médecins spécialistes qui exercent en secteur 2 (honoraires libres) prescrivent sensiblement moins de médicaments génériques (rappelons que la proportion de médecins en secteur 2 est plus élevée en région parisienne que dans le reste de la France : 57,3 % contre 36,2% en moyenne nationale. -les pharmacies dont le taux de génériques est le plus faible sont des officines se trouvant dans des grandes villes, dont les clients ne résident pas forcément à proximité. Ces officines sont souvent implantées depuis plus longtemps que les autres. -les patients atteints d’une affection de longue durée, quel que soit leur âge, consomment également moins de génériques.

Les disparités de prescriptions de médicaments varient également selon les classes thérapeutiques. A titre d’exemple, pour les antibiotiques, on recensait, durant l’hiver 2003­2004, 0,7 prescription d’antibiotique par habitant en Haute Normandie contre 0,5 prescription en Rhône Alpes (source graphique page 8 dossier de presse CNAMTS du 19/10/04). La prescription de consommateurs de psychotropes varie également selon les régions : 10,2% des lorrains ont bénéficié d’au moins quatre remboursements de médicaments psychotropes au cours de l’année 2000 contre 14,2% des habitants du Limousin (étude publiée dans la revue médicale de l’Assurance Maladie n° 34, Oct. Déc. 2003).

Pour réduire ces disparités géographiques de prescriptions, l’Assurance Maladie mène des actions sur le terrain au plus proche des professionnels de santé et des assurés grâce à son réseau départemental et régional (CPAM et URCAM). Ceux-ci doivent atteindre des objectifs chiffrés adaptés à chaque contexte local dans quatre domaines particuliers : médicaments génériques, antibiotiques, examens thyroïdiens, transports sanitaires (cf. annexe) L’Assurance Maladie souhaite développer ce type de programmes : des nouveaux thèmes d’action seront lancés courant 2005 en prenant appui sur les thèmes de maîtrise médicalisée définis au sein de la convention.

Des programmes régionalisés de régulation

Pour réduire ces disparités géographiques de prescriptions, l’Assurance Maladie mène des actions sur le terrain au plus proche des professionnels de santé et des assurés grâce à son réseau départemental et régional (CPAM et URCAM).

La caisse nationale a fixé aux CPAM et URCAM des objectifs chiffrés sur le dernier trimestre 2004, adaptés à chaque contexte local concernant quatre domaines particuliers :

-Génériques prescrits par des généralistes. L’objectif national est de faire passer la part de marché des génériques de 60% - taux actuel- à 70 % à fin décembre 2004 (nombre de boites de génériques / total médicaments généricables). Cet objectif national nécessite des efforts plus importants de la part des régions et caisses locales où la consommation de génériques est inférieure à la moyenne : l’effort demandé varie de 6,5 points pour les régions en pointe dans ce domaine à 12 points pour les régions les plus en retard.

-Examens thyroïdiens prescrits par des généralistes. L’objectif national (décliné de l’accord de bon usage des soins passé avec les généralistes) est de faire baisser de 50 %, d’ici à fin 2004, la part des bilans thyroïdiens complets, trop souvent réalisés, au profit de bilans simples. Cet objectif chiffré varie selon les régions. A titre d’exemple, la baisse demandée est de 30% pour la région Haute-Normandie où la proportion d’examens thyroïdiens complets est inférieure à la moyenne nationale.

-Transports sanitaires prescrits par des généralistes. L’objectif national (décliné de l’accord de bon usage des soins passé avec les généralistes) est de diminuer les transports en ambulance au profit des autres transports sanitaires et d’obtenir une part de 28,4% des transports en ambulance par rapport à l’ensemble des transports réalisés (contre 35% aujourd’hui). Les disparités observées sur cet indicateur sont très importantes entre les régions : seules les régions au dessus de la moyenne nationale doivent faire un effort en la matière.

-Antibiotiques. L’Assurance Maladie a pour objectif de réduire de 25 % le nombre de prescriptions d’antibiotiques d’ici à 2007. Un objectif de baisse de 5% a été fixé à chaque région pour l’hiver 2004. Rappelons qu’entre les hivers 2001-2002 et 2003-2004, la baisse du nombre de prescriptions corrigé des variations épidémiques (source : Institut Pasteur) varie de -3% à -26% selon les régions.

Une partie de l’intéressement des organismes est liée à l’atteinte de ces objectifs.

Profession : régulation médicalisée

Pour atteindre les objectifs fixés, les organismes locaux mobilisent notamment leurs délégués de l’Assurance Maladie et selon les cas, les médecins conseil pour informer, conseiller et convaincre les professionnels de santé.

Les délégués de l’Assurance Maladie sont chargés de promouvoir auprès des professionnels de santé les accords de bon usage des soins conclus entre l’Assurance Maladie et les médecins (antibiotiques, examens thyroïdiens, prescriptions de transports).

Les médecins-conseil interviennent plus spécifiquement lorsque le contenu de l’entretien est médicalisé (antibiotiques, examens thyroïdiens).

Les délégués et les médecins conseil de l’Assurance Maladie disposent notamment d’outils d’information à destination des médecins généralistes rencontrés : les retours d’information personnalisée qui permettent aux médecins de mieux situer leur pratique en comparant leur pratique à une moyenne départementale ou régionale, les référentiels de bonnes pratiques... Depuis le début 2004, les délégués de l’Assurance Maladie ont effectué prés de 19 000 entretiens aux cabinets des médecins généralistes.

Les caisses d’Assurance Maladie mènent également des actions d’information ciblées en direction des assurés. Actuellement, plusieurs caisses expérimentent une information ciblée aux assurés sur leur consommation de génériques (concrètement, la caisse promeut les génériques auprès des gros consommateurs de médicaments de marque). Cette expérimentation, en cours d’évaluation, sera, le cas échéant, généralisée à l’ensemble du territoire au printemps 2005.

Un bilan d’étape de ces programmes d’actions régionalisés sera disponible au printemps 2005. L’Assurance Maladie souhaite développer ce type de programmes : des nouveaux thèmes d’action seront lancés courant 2005 en prenant appui sur les thèmes de maîtrise médicalisée définis au sein de la convention.

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