DMP obligatoire : le PLFSS 2026 introduit des amendes jusqu’à 2 500 €

DMP obligatoire : le PLFSS 2026 introduit des amendes jusqu’à 2 500 € Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2026, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale, introduit une réforme structurante de l’usage du Dossier médical partagé (DMP) dans « Mon espace santé ». L’article 31 du texte législatif prévoit que les professionnels de santé devront alimenter et consulter ce dossier sous peine de sanctions financières. L’objectif affiché est de renforcer la coordination des soins et d’éviter les examens redondants.

Un tournant législatif pour l’usage du DMP

Selon le texte officiel publié par l’Assemblée nationale[1], l’article 31 du PLFSS 2026 modifie le code de la sécurité sociale pour imposer l’alimentation systématique du DMP par tout professionnel de santé réalisant un acte ou une prescription donnant lieu à remboursement. Le même article rend obligatoire la consultation du dossier « préalablement à la prescription ou à la réalisation d’actes, de produits ou de prestations de santé dont la liste est fixée par décret ».

L’exposé des motifs justifie cette mesure par la nécessité de « généraliser l’usage du Dossier Médical Partagé afin d’améliorer la continuité des soins et d’éviter la redondance d’examens coûteux ou inutiles ». Il précise que cette obligation vise à « sécuriser les parcours de soins et à renforcer l’efficience des dépenses de santé ».

Lutte contre le nomadisme médical : logique et objectifs

Le gouvernement rattache cette réforme à la lutte contre le « nomadisme médical », c’est-à-dire la multiplication de consultations et d’examens pour un même patient faute de partage d’information. L’exposé des motifs insiste sur la capacité du DMP à réduire les redondances d’actes « estimés entre 15 % et 40 % dans le secteur de l’imagerie par exemple » et à « sécuriser les parcours de soins ». [1] Il ajoute que l’alimentation du DMP « permet de faire gagner du temps aux professionnels qui n’ont plus à rechercher les données de leurs patients et contribue à la bonne coordination des soins, notamment entre la ville et l’hôpital ». [1]

  • révéler les examens et prescriptions déjà réalisés ;
  • éviter la répétition d’imagerie et de bilans ;
  • améliorer la connaissance des antécédents, traitements et allergies ;
  • tracer et sécuriser les décisions médicales, au bénéfice du patient et de l’Assurance maladie.

Des sanctions graduées et encadrées

L’article 31 prévoit explicitement un régime de sanctions financières en cas de manquement. Les montants maximaux sont fixés à 2 500 € par manquement pour les professionnels de santé individuels, avec un plafond annuel de 10 000 €, et à 25 000 € par manquement pour les établissements de santé, dans la limite de 100 000 € par an. [1] Ces sanctions seront prononcées par les caisses primaires d’assurance maladie après procédure contradictoire.

Le produit des amendes sera affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM). Le texte renvoie à un décret pour préciser les conditions d’application, notamment les modalités de constatation des manquements et les cas d’exonération.

Des réactions critiques du corps médical

L’obligation d’alimenter et de consulter le DMP suscite de vives critiques parmi les syndicats médicaux. Pour le Dr Franck Devulder, président de la CSMF, « imposer des obligations ou des sanctions sans garantir des outils interopérables et performants est contre-productif ». [2] La FMF dénonce une mesure « anti-libérale », qui renforce la tutelle numérique de l’État sur la pratique médicale. [3] Le Leem, représentant les industriels du médicament, s’inquiète de possibles effets de bord sur la rapidité d’accès aux innovations thérapeutiques. [2]

Charge administrative et inquiétudes syndicales

Selon MG France, cette obligation alourdit considérablement la charge administrative des praticiens : « C’est chronophage et souvent inutile », juge sa présidente Agnès Giannotti. [4] Le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-Syndicat, estime que cette réforme « ignore la réalité du soin et la pression exercée sur les praticiens ». [2] Sur le réseau X, le collectif Médecins Pour Demain dénonce une « logique punitive où la paperasse prime sur le soin ». [5]

Une mise en œuvre progressive mais sous contrainte

L’entrée en vigueur complète est prévue « au plus tard au 1er mars 2027 » pour les dispositions relatives à la consultation obligatoire du DMP. Le gouvernement mise sur une période transitoire pour permettre aux professionnels d’adapter leurs systèmes d’information. Les décrets d’application préciseront la liste des actes soumis à l’obligation, les modalités de contrôle et les cas d’exemption justifiée. [1]

Selon l’exposé des motifs, le dispositif s’inscrit dans une logique d’« efficacité et de responsabilisation des acteurs du système de santé », s’appuyant sur les outils numériques pour « réduire les dépenses évitables et améliorer la qualité du service rendu aux assurés ». [1]

Ce qu’il reste à définir avant l’application du texte

  • Actes et produits concernés : une liste fixée par décret déterminera les situations où la consultation du DMP sera obligatoire. [1]
  • Procédure de sanction : les modalités de contrôle, de notification et de recours doivent encore être précisées.
  • Consentement patient : le DMP reste sous le contrôle du patient, qui peut masquer certaines données. [6]

Références

[1] Assemblée nationale – Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, Article 31, 14/10/2025, lien

[2] Le Quotidien du Médecin – « PLFSS 2026 : jusqu’à 2 500 euros d’amende par manquement », 16/10/2025

[3] Fédération des Médecins de France (FMF), 10/2025

[4] MG France – Communiqué « PLFSS : un dispositif chronophage », 15/10/2025

[5] X – Médecins Pour Demain, 17/10/2025

[6] Vie-publique.fr – « Du dossier médical partagé à Mon espace santé »

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