Aurélien Rousseau qualifie l’accès direct aux soins de « mirage » et provoque la colère des infirmiers et des kinés

Aurélien Rousseau qualifie l’accès direct aux soins de « mirage » et provoque la colère des infirmiers et des kinés Vendredi 6 octobre, le ministre de la Santé et de la Prévention Aurélien Rousseau a jeté un pavé dans la marre en mettant en doute l’intérêt de l’accès direct aux soins par les professions paramédicales. Il a au contraire consacré la place centrale du médecin traitant dans la coordination et le suivi du parcours de soins. Une volteface appréciée par son auditoire composé de cadres de la CSMF mais peu goûtée par les organisations représentant les infirmiers et les kinés.

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« Penser que l’accès direct donné aux paramédicaux nous sortira des difficultés est une fausse promesse, un mirage et je ne poursuivrai pas sur ce chemin » Aurélien Rousseau le 6/10/2023

Lors de son intervention en ouverture de l’Université d’été de la CSMF à Arcachon, le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a posé certains jalons à la veille de très probables négociations conventionnelles entre l’Assurance-maladie et les médecins : le « renforcement » du rôle du médecin traitant et la nécessité de structurer davantage la médecine spécialisée « afin de mieux répondre aux problèmes d’accès aux soins ». La question de la pertinence et de la qualité des soins sera également à l’ordre du jour, notamment « dans un contexte de très fortes dépenses des soins de ville ». Il a aussi souligné l’importance de rendre la médecine de ville plus attractive, en évoquant l’évolution des modalités de rémunération.

Il a livré avec une certaine franchise ou démagogie selon les points de vue sa vision de l’organisation de la médecine de ville « C’est le médecin qui doit coordonner et suivre toutes les interventions pluriprofessionnelles », a-t-il rappelé, visant à dissiper les inquiétudes sur une possible dilution du rôle du médecin. « Il ne s’agit pas de le remplacer comme certains l’avancent parfois », a-t-il renchéri. Le ministre a été on ne peut plus clair : « Au contraire, nous devons assurer que chaque Français doit pouvoir avoir un médecin traitant ».

Aurélien Rousseau a également évoqué une « confusion » souvent entretenue entre le rôle du médecin traitant et l’accès direct à certains soins par des professionnels paramédicaux. « Penser que l’accès direct donné aux paramédicaux nous sortira des difficultés est une fausse promesse, un mirage et je ne poursuivrai pas sur ce chemin », a-t-il déclaré, récoltant des applaudissements.

Cette mise au point intervient alors que :

  • le PLFSS 2024 envisage la possibilité pour les pharmaciens de délivrer des antibiotiques sur la base d’un test rapide d’orientation diagnostique (Trod), contournant ainsi le médecin pour certaines pathologies comme la cystite ou l’angine.
  • La loi RIST du 19 mai 2023 a entériné l’accès direct des patients aux infirmiers en pratique avancée (IPA), aux kinés et aux orthophonistes

L’accès direct des patients aux professions paramédicales ou « accès direct aux soins »

Depuis la promulgation en mai 2023 de la loi dite « RIST » portant sur l’amélioration de l’accès aux soins, les patients ont la possibilité de consulter directement certains professionnels paramédicaux sans ordonnance médicale. Ce changement concerne les infirmiers en pratique avancée (IPA), les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes exerçant soit en établissement hospitalier, en clinique, dans un établissement social ou médico-social, soit en ville dans une maison ou un centre de santé.

Pour les masseurs-kinésithérapeutes, la loi encadre cet accès en limitant le nombre de séances autorisées à huit sans consultation médicale préalable. Les orthophonistes peuvent également être consultés directement dans des structures de soins coordonnées ou dans le cadre d’une communauté professionnelle territoriale de santé (CTPS), si cela est prévu par le projet de santé de la structure.

En marge de ces dispositions, une expérimentation sera menée pendant cinq ans dans six départements, permettant l’accès direct aux IPA et aux masseurs-kinésithérapeutes au sein d’une CTPS. Cette expérimentation fera l’objet d’une évaluation par le gouvernement, qui décidera ensuite de sa possible généralisation.

Quelle que soit la configuration, un compte rendu des soins administrés devra être systématiquement transmis au médecin traitant du patient et inclus dans son dossier médical partagé.

 

Les syndicats infirmiers appellent à la stabilité et à la clarté dans les orientations politiques

Les infirmiers ont exprimé leur indignation face à ces propos, soulignant l’importance de leurs compétences dans un système de santé en crise. François Braun, le précédent ministre de la Santé, avait réitéré en janvier 2023, lors de ses vœux aux professionnels de santé, l’engagement pris par le gouvernement de porter le nombre d’infirmiers en pratique avancée (IPA) en activité à 5 000 d’ici 2024. D’après le SNIIL, ouvrir l’accès direct aux infirmiers pour les patients porteurs de plaies et les patients dépendants faciliterait une intervention rapide et adaptée et donc une meilleure prise en charge de ce type de problématique.


Le CEFIEC, qui représente quelque 331 Instituts de Formation en Soins Infirmiers, sollicite du ministre une clarification quant à sa feuille de route concernant l’avenir de la profession infirmière et de la filière paramédicale. L’organisme insiste sur la nécessité d’une stratégie claire et cohérente qui garantisse une offre de soins accessible à tous, sur l’ensemble du territoire national. Le CEFIEC prône une approche interprofessionnelle respectueuse des contributions spécifiques de chaque professionnel de santé et utilise pleinement les compétences développées en formation. Il souligne également l’importance de la stabilité dans les orientations politiques afin de permettre une planification et une mise en œuvre efficaces des politiques de santé pour le bénéfice de tous.

Cette déclaration, perçue comme un revirement par rapport aux perspectives précédemment annoncées par son prédécesseur, François Braun, a été mal accueillie par les professionnels de santé sur le terrain, qui demandent au ministre de clarifier sa vision et sa stratégie pour l’avenir de la profession infirmière et de la filière paramédicale.

Pour les masseurs-kinésithérapeutes, l’accès direct est une opportunité et non pas un mirage

La Fédération des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR) a également exprimé son indignation face aux propos du ministre. Selon eux, l’accès direct n’est pas un mirage, mais une réelle opportunité pour améliorer l’accès aux soins. Ils affirment que l’accès direct est une solution efficace et immédiate pour désengorger les cabinets médicaux et services d’urgences, et un levier important d’économies pour l’Assurance maladie.

Dans un communiqué, la FFMKR se dit « profondément choquée » par les déclarations du ministre et dénonce un double discours. Selon l’organisation, l’accès direct est une des solutions « les plus efficaces pour mieux mobiliser les compétences des professionnels paramédicaux » et pour « améliorer l’accès aux soins rapidement dans un contexte démographique plus tendu que jamais ». La Fédération souligne également que l’accès direct peut être un « levier important d’économies pour l’Assurance maladie ».

La FFMKR « demande un rendez-vous d’urgence auprès du ministre afin de clarifier rapidement ses intentions ». L’organisation s’est engagée à construire de nouveaux modèles de prise en charge, en lien étroit avec le médecin traitant, et appelle à une multiplication des « portes d’entrée dans le système de santé ».

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