Le scorbut fait son retour en France selon une étude de l'APHP
Une maladie ancienne révélatrice d’un mal-être contemporain
Le scorbut, connu historiquement comme la « maladie des marins », est causé par une carence prolongée en vitamine C. Si cette maladie semblait appartenir au passé, des chiffres récents bouleversent cette perception. Une étude menée par des équipes de l’AP-HP et de l’Inserm, en collaboration avec l’Université Paris Cité et l’hôpital de Cayenne, montre une augmentation cumulative de 34,5 % des cas de scorbut chez les enfants hospitalisés en France entre 2020 et 2023. Cette hausse est particulièrement marquée chez les enfants de 5 à 10 ans, avec une augmentation impressionnante de 200 % depuis la pandémie.
Selon Ulrich Meinzer, chef de service à l’hôpital Robert-Debré et coordinateur de cette étude, « Ces données sont inquiétantes, sans doute sous-évaluées puisque nous ne comptons que les hospitalisations, mais elles correspondent à ce qu’on voit à l’hôpital. » (Libération.fr). Parmi les enfants hospitalisés, 22,6 % souffraient également de malnutrition sévère, ce qui souligne la forte corrélation entre précarité socio-économique et état nutritionnel dégradé.
Les témoignages des pédiatres corroborent ces observations. Ainsi, un enfant de cinq ans, pris en charge au CHU de Nîmes, boitait et souffrait de douleurs osseuses. Après des tests nutritionnels, il a été diagnostiqué avec un scorbut lié à une alimentation limitée à « des yaourts et des boudoirs ». Comme dans la plupart des cas, une supplémentation en vitamine C a permis une récupération rapide, mais ces histoires sont révélatrices de situations plus systémiques.
La précarité et les habitudes alimentaires en cause
L’étude met en lumière l’impact de la crise économique post-COVID-19 et de l’inflation sur la résurgence du scorbut. En France, les prix des produits alimentaires ont augmenté de 15 % en 2023, réduisant l’accès à une alimentation équilibrée, notamment pour les familles précaires. Selon l’équipe de recherche : « L'incidence croissante du scorbut met en évidence la relation entre l'inflation des prix alimentaires et l'accès réduit à une alimentation équilibrée pour les familles les plus précaires. » (The Lancet Regional Health - Europe).
Ces constats sont renforcés par des témoignages de terrain. Au CHU de Montpellier, un adolescent en fauteuil roulant depuis des mois, incapable de plier les genoux, a été diagnostiqué avec un scorbut avancé lié à une alimentation limitée à « des pâtes et des Danette ». Ce cas extrême illustre les lacunes de l’éducation nutritionnelle, mais aussi l’influence des produits transformés dans les habitudes alimentaires modernes. Comme l’explique Eric Jeziorski, chef du service de pédiatrie générale : « Ce n’est pas négligeable pour une maladie qu’on croyait disparue. » (Libération.fr).
Outre la précarité financière, d’autres facteurs contribuent à cette crise. L’étude montre que près de 6 % des enfants hospitalisés pour scorbut présentent un trouble autistique et 5 % souffrent d’anorexie, des pathologies qui compliquent l’accès à une alimentation variée et riche en vitamines.
Protéger la santé des enfants face à la précarité alimentaire
Face à cette situation alarmante, les chercheurs appellent à des mesures urgentes pour prévenir la réémergence du scorbut. L’équipe d’Ulrich Meinzer souligne : « Il faut une réponse rapide : favoriser l’accès à des produits de qualité, une meilleure éducation alimentaire, et une formation accrue des soignants pour prévenir et détecter les carences. » (Libération.fr). Ces recommandations incluent :
- Renforcer les programmes d’aide alimentaire ciblés, en améliorant l’accès des familles précaires aux fruits et légumes riches en vitamine C.
- Former les professionnels de santé à reconnaître les signes précoces de carences nutritionnelles, afin d’éviter des diagnostics tardifs ou des examens invasifs inutiles.
- Sensibiliser les familles à une alimentation variée, malgré les contraintes économiques.
Comme le conclut l’étude scientifique : « La résurgence du scorbut dans un pays à haut revenu comme la France souligne l'importance de protéger les populations vulnérables à travers des politiques nutritionnelles adaptées. » (The Lancet Regional Health - Europe).
Une maladie révélatrice des inégalités sociales
Le scorbut, bien que rare, est un indicateur de déséquilibres sociaux et économiques. En réapparaissant chez les enfants, il alerte sur l’insécurité alimentaire croissante et les inégalités qui touchent les populations précaires. Au-delà de cette maladie, c’est tout un système de santé publique qu’il faut réinterroger pour garantir aux générations futures un accès équitable à une nutrition saine et équilibrée.
Les principales sources de vitamine C :
La vitamine C, aussi appelée acide ascorbique, se trouve principalement dans les aliments d'origine végétale. Voici une liste des meilleures sources par catégorie :
1. Fruits riches en vitamine C :
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Agrumes :
- Orange, citron, pamplemousse, mandarine, clémentine.
- Contenu moyen : 50-60 mg/100 g.
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Fruits rouges :
- Fraises, framboises, groseilles, cassis.
- Cassis : environ 200 mg/100 g (très riche).
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Kiwi :
- Très riche : environ 92 mg/100 g.
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Fruits exotiques :
- Papaye (60 mg/100 g), mangue (36 mg/100 g), ananas (18 mg/100 g), goyave (200 mg/100 g).
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Autres fruits :
- Melon, grenade, et abricot frais.
2. Légumes riches en vitamine C :
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Famille des choux :
- Brocoli, chou-fleur, chou de Bruxelles, chou kale.
- Chou kale : environ 120 mg/100 g.
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Poivrons :
- Très riche, notamment le poivron rouge : environ 150 mg/100 g.
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Épinards et autres feuilles vertes :
- Épinards crus (28 mg/100 g), mâche, cresson.
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Légumes racines :
- Navets, rutabagas, radis noir.
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Tomates et leurs dérivés :
- Riches en vitamine C lorsqu'elles sont consommées crues.
3. Herbes et aromates :
- Persil frais :
- Extrêmement riche : environ 170 mg/100 g.
- Ciboulette, basilic et coriandre :
- De bonnes sources, notamment lorsqu'utilisées fraîches.
4. Sources animales (très limitées) :
- Foie de certains animaux :
- Le foie de veau et de poisson contient de petites quantités.
- Lait maternel :
- Pour les nourrissons, c'est une source essentielle de vitamine C.
5. Compléments alimentaires :
- Sous forme de comprimés, capsules, ou poudres, utilisés en cas de carence diagnostiquée ou de besoins spécifiques.
Conseils pour préserver la vitamine C :
- Consommer cru ou peu cuit : La vitamine C est sensible à la chaleur, la lumière et l'air. Une cuisson douce (vapeur ou poêlée rapide) préserve mieux les nutriments.
- Éviter le stockage prolongé : Consommer les fruits et légumes frais pour limiter la dégradation de la vitamine C.
En incorporant des aliments riches en vitamine C au quotidien, vous contribuez à renforcer votre système immunitaire et à améliorer votre santé globale.
https://doi.org/10.1016/j.lanepe.2024.101159
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