Maladie d'Alzheimer : les mécanismes moléculaires expliqués

Des chercheurs américains viennent pour la première fois d'expliquer in vivo le mécanisme de formation des plaques séniles responsables de la maladie d'Alzheimer. Cette découverte, qui sera publiée dans le numéro du 14 mars de Proceedings of the National Academy of Sciences, permet également de comprendre pourquoi des personnes porteuses d'une mutation sur le gène codant pour l'apolipoprotéine E présentent plus de risques de développer la maladie.

La maladie d'Alzheimer est une maladie neurodégénérative. Elle est caractérisée par la présence dans le cerveau de plaques séniles et par la dégénérescence des connexions entre les cellules nerveuses. Ces plaques sont constituées d'agrégats insolubles d'une petite protéine : le peptide béta-amyloïde. Ce peptide béta-amyloïde, dont la fonction reste inconnue, est retrouvé, sous une forme soluble, à de faibles concentrations dans les liquides corporels. Son dépôt dans le cerveau et sa conversion en forme insoluble serait à l'origine de la formation des agrégats fibrillaires qui caractérisent les plaques séniles. On savait jusqu'à présent que certaines formes de l'apoliprotéine E (apoE) semblaient favoriser développement de la maladie.

Les scientifiques ont démontré dans cette étude que apoE est indispensable au développement des plaques séniles : apoE convertirait les peptides béta-amyloïdes en formes insolubles pathogènes. De plus, les dépôts de peptides béta-amyloïdes n'entraînent pas de dégénérescence neuronale en absence d'apoE. Enfin, la forme apoE4 humaine favorise la formation et l'expansion des plaques séniles.

Cette découverte est le fruit de la collaboration entre deux équipes : l'équipe de D. Holtzman (Washington University School of Medicine, St Louis, USA) et le groupe de S. Paul (Lilly Research Laboratories, Indianapolis, USA).

Pour ces recherches, les auteurs ont utilisé un modèle de souris transgéniques qui développent des dépôts de peptides béta-amyloïdes.

Lorsqu'on exprime l'apoE murine ou humaine chez ces souris, on retrouve dans leur cerveau des dépôts fibrillaires de peptides béta-amyloïdes entourés de neurones dont les axones (prolongements des neurones) sont dégénérés. Les auteurs précisent également que apoE est indispensable à la croissance des plaques séniles associées à la dégénération axonale.

Un autre résultat marquant est la présence de dépôts non-fibrillaires de peptides béta-amyloïdes chez des souris dépourvues d'apoE sans que l'on note une dégénérescence axonale.

Ceci semble indiquer que seuls les dépôts fibrillaires sont associés à une neurodégénérescence. Leur formation semble conditionnée par la présence d'apoE qui assurerait donc la conversion des peptides béta-amyloïdes natifs en une isoforme susceptible de former des agrégats fibrillaires.

Deux types d'apoE humaine ont été étudiés dans ces travaux : l'apoE3 et l'apoE4. L'expression des ces protéines dans le cerveau de souris dépourvues d'apoE murine restaure la formation d'agrégats fibrillaires de peptides béta-amyloïdes. Ces dépôts ont été retrouvés dans l'hippocampe de 89 % des souris apoE4 et 33 % des souris apoE3. De plus, certaines souris apoE4 (mais aucune souris apoE3) présentent des agrégats fibrillaires dans le néopallium (ou néocortex). La coloration des agrégats montre que les rongeurs apoE4 ont 10 fois plus de dépôts fibrillaires dans l'hippocampe que les rongeurs apoE3.

Selon D. Holtzman : "Le fait qu'apoE4 (protéine humaine) puisse augmenter à la fois la quantité de peptide béta-amyloïde et la formation de fibres amyloïdes pourrait expliquer pourquoi cette version de la lipoprotéine E est un facteur de risque génétique pour la maladie d'Alzheimer".

Source : PNAS Early Edition, Vol. 1, Number 6, February 29, 2000 ; press release from Washington University School of Medicine

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