Santé mentale des soignants : une crise qui s’aggrave

Santé mentale des soignants : une crise qui s’aggrave Le baromètre Odoxa-MNH de mai 2025 révèle une détérioration alarmante de la santé psychologique des soignants, avec 35 % en mauvaise santé mentale, contre 29 % en 2020. Pression professionnelle, violences répétées, et lacunes dans la formation initiale alimentent une crise structurelle, qui fragilise les soignants et menace la qualité des soins. Face à l’inaction politique, des initiatives émergent, mais des solutions concrètes restent urgentes.

Une fragilité psychologique ancrée dès la formation

L’enquête Odoxa, réalisée pour la MNH et Le Figaro Santé, dresse un tableau préoccupant : 35 % des soignants se déclarent en mauvaise santé mentale, un taux 2,5 fois supérieur aux autres actifs ( 6 points en un an). Cette détresse varie selon les métiers : les infirmiers (34 %) et aides-soignants (32 %) sont les plus touchés, contre 18 % des médecins. Cette disparité s’explique par des conditions spécifiques : les aides-soignants subissent des violences à 66 %, les infirmiers jonglent entre tâches techniques et coordination, tandis que les médecins, souvent plus autonomes, bénéficient d’un statut protecteur.

Les symptômes – anxiété chronique, insomnies (89 %), troubles alimentaires (80 %), baisse d’activité physique (78 %) – traduisent un mal-être profond. Pour 39 % des soignants, cette détresse a conduit à un arrêt de travail, et 4 sur 10 souffrent de burn-out. « Ce n’est pas une fatalité : en agissant dès la formation, nous pouvons outiller les soignants », insiste Jean-Bernard Castet, de la MNH.

Ce malaise prend racine dès les études : 42 % des soignants de moins de 35 ans rapportent des difficultés psychologiques durant leur formation, et 83 % jugent ne pas avoir été préparés à gérer le stress. Ce constat, amplifié par la pandémie, appelle une réforme des cursus.

Conditions de travail : un cocktail explosif

La surcharge de travail, citée par 75 % des soignants, est le principal facteur de stress, suivie des violences verbales (41 %) et physiques (30 %), souvent de patients ou de proches. Les aides-soignants sont particulièrement exposés (66 %), tandis que les internes, avec 59 heures hebdomadaires, frôlent l’épuisement (21 % en syndrome dépressif, selon @ISNItwit sur X). Le manque de reconnaissance (51 %), les cadences excessives (45 %), le décalage entre attentes et réalité (35 %), et la stigmatisation de la santé mentale aggravent la crise.

Sur X, les témoignages confirment cette réalité. @django_car, probable soignant, décrit un traumatisme : « La nuit, tu fais des cauchemars, tu n’as plus envie d’exercer. » @LeGrandDruide, conjoint d’une sage-femme, évoque une charge mentale persistante après 20 ans de carrière. @Annette_LEXA, sarcastique, parle d’un « hôpital psychiatrique » où les soignants sont « plus fous que les malades ». @Chat_Pas_Net relate des infirmières quittant le métier à cause d’un patron harceleur, sombrant dans la solitude. Enfin, @Lingeer_aida, patiente, lie l’épuisement des soignants à un système qui « ne se soucie plus des vies humaines ».

Ces voix, corroborées par une enquête anonyme de Soins aux Professionnels en Santé (SPS), révèlent que 60 % des kinésithérapeutes hospitaliers souffrent de stress lié à la sous-dotation. À l’inverse, un urgentiste lyonnais témoigne : « Les groupes de parole m’ont sauvé du burn-out », montrant des stratégies de résilience. Ces récits variés soulignent que 86 % des soignants estiment que leur état mental impacte leurs capacités, et 90 % pensent qu’une meilleure préparation émotionnelle réduirait l’absentéisme.

« Les soignants n'ont pas une santé psychologique dégradée à cause d’une faiblesse individuelle, mais parce que leurs conditions de travail les y conduisent », souligne Gaël Sliman, président d’Odoxa.

Une crise qui s’inscrit dans la durée

La santé mentale des soignants se dégrade depuis des années. En 2020, 29 % étaient en mauvaise santé mentale, et 56,9 % en détresse pendant la crise COVID (étude AP-HP). Cette tendance, aggravée par des traumatismes persistants et des problèmes structurels (surcharge, violences), atteint un pic en 2025. Sans intervention, la spirale risque de s’accélérer, menaçant la pérennité du système de santé.

Des initiatives face à l’inaction politique

Des soignants prennent l’initiative. Le Dr Candice Delbet-Dupas, chirurgienne maxillo-faciale, alerte dans Le Point (9 mai 2025) : « L’épuisement et les suicides explosent. » Après deux burn-out, elle a fondé les Bazars de la santé, un centre de ressources à Vichy pour le bien-être des soignants. Maxim Challiot, médecin narcoleptique, témoigne d’un stage d’internat éprouvant et du suicide d’une collègue sous pression hiérarchique. Il milite pour des ateliers de méditation, qui l’ont aidé à se reconstruire.

Ces efforts contrastent avec l’inaction politique. En 2024, Michel Barnier avait promis un plan interministériel pour la santé mentale, mais aucun budget n’a suivi, freiné par un déficit hospitalier de 1,8 milliard d’euros. La feuille de route attendue depuis 2023 n’a jamais vu le jour. « Tout le monde parle de prévention, mais il n’y a pas de financement », regrette Delbet-Dupas, restée sans réponse après trois appels au ministère.

Des solutions concrètes pour briser la spirale

Les soignants proposent des leviers précis, soutenus par des modèles éprouvés :

Compétences psychosociales (49 %) : Adapter le programme australien PsySTART, qui forme à la gestion du stress, dès 2026 dans les écoles d’infirmiers et de médecine (budget estimé : 50 millions d’euros sur 3 ans, via les ARS).

Psychologues hospitaliers (42 %) : Recruter 500 psychologues d’ici 2027 (100 millions d’euros, finançables par la protection sociale complémentaire hospitalière).

Prévention et communication (39 %) : Lancer des ateliers de communication non violente dans 10 CHU pilotes en 2026, supervisés par les ARS, pour réduire les conflits (10 millions d’euros).

Espaces d’expression : Étendre la ligne d’écoute MNH pour créer une plateforme anonyme, encouragée par 42 % des soignants, dès 2026.

Ces mesures, inspirées de programmes comme RISE (soutien peer-to-peer aux États-Unis), nécessitent une volonté politique forte. Un redéploiement des fonds hospitaliers et un plan interministériel clair pourraient les concrétiser, brisant la stigmatisation et renforçant la résilience.

Conclusion

La crise de la santé mentale des soignants, aggravée depuis la pandémie, exige une réponse collective. Les témoignages, de X aux enquêtes anonymes, révèlent une détresse ancrée dans des conditions de travail toxiques et des formations inadaptées. Si des initiatives comme les Bazars de la santé montrent la voie, elles ne suffisent pas sans un engagement politique. Financer 500 psychologues, réformer les cursus, et protéger les soignants des violences sont des priorités pour préserver un système de santé déjà à bout de souffle. L’heure n’est plus aux promesses, mais à l’action.

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