PLFSS 2026 : l’amendement 159 veut mettre fin au remboursement des soins se réclamant de la psychanalyse

PLFSS 2026 : l’amendement 159 veut mettre fin au remboursement des soins se réclamant de la psychanalyse Dans le cadre de l’examen du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, un amendement sénatorial (n°159) propose, à compter du 1er janvier 2026, de mettre un terme au remboursement de « tout soin, acte et prestation se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques ». Le texte, discuté en séance publique au Sénat du 19 au 26 novembre 2025, a suscité de vives réactions parmi les sociétés savantes, syndicats et associations professionnelles. Au-delà du débat idéologique, se jouent des enjeux juridiques, organisationnels et d’accès aux soins pour des milliers de patients. [1][2]

Contenu et calendrier parlementaire

L’amendement 159, examiné en première lecture au Sénat, prévoit : « À compter du 1er janvier 2026, les soins, actes et prestations se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques ne donnent plus lieu à remboursement, ni à participation financière de l’Assurance maladie ». Il renvoie à un décret en Conseil d’État pour ses modalités d’application. Le dossier législatif précise que la discussion en séance publique s’étale du 19 au 26 novembre 2025. [1][2]

Les motivations affichées par les auteurs

Dans l’« objet » de l’amendement, les auteurs affirment que « les soins fondés sur la psychanalyse […] ne disposent aujourd’hui d’aucune validation scientifique ni d’évaluation positive du service médical rendu par la Haute Autorité de Santé (HAS) » et justifient un recentrage des financements publics sur les pratiques « dont l’efficacité est démontrée et évaluée ». [1]

Réactions des sociétés savantes et des organisations professionnelles

La Société Psychanalytique de Paris (SPP) juge la rédaction de l’amendement problématique et alerte sur un risque d’atteinte à l’accès aux soins. Des organisations de psychologues dénoncent une « psychothérapie d’État ». Plusieurs syndicats, dont l’Union Syndicale de la Psychiatrie, appellent au retrait du texte. [3][4][5]

Déclarations et prises de position

« Scientifiquement flou, cliniquement impraticable et juridiquement explosif. » [6]
« Dérembourser n’est pas un geste neutre. C’est réserver certaines formes de prise en charge à ceux qui peuvent les payer, et les interdire de fait aux autres. » [6]

Dans la presse, des représentants des sociétés psychanalytiques qualifient la mesure de « liberticide » et « inapplicable ». [4]

Que disent les preuves ? état de la littérature sur les approches psychodynamiques

Le débat parlementaire oppose fréquemment « psychanalyse » et « psychothérapies validées ». Or la littérature internationale relative aux thérapies psychodynamiques (au sens large : psychodynamique brève, soutien psychodynamique, thérapies d’inspiration analytique) est substantielle. Des synthèses méthodiques récentes et des méta-analyses montrent, selon les indications, une efficacité comparable à d’autres psychothérapies de référence (notamment les TCC) pour les troubles dépressifs, anxieux ou certains troubles de la personnalité ; certaines études suggèrent des effets qui se maintiennent au suivi. [7][8][9][10][11]

Exemples : une méta-analyse 2023 d’« individual participant data » confirme l’efficacité des psychothérapies psychodynamiques brèves pour la dépression versus conditions contrôles ; des travaux de synthèse soulignent par ailleurs une équivalence moyenne entre psychodynamique et TCC pour les dépressions de l’adulte. [10][11]

Ces résultats n’épuisent pas la discussion (qualité hétérogène des essais, biais d’allégeance, indications spécifiques), mais ils contredisent l’assertion d’une absence de validation. Les débats actuels portent davantage sur pour qui, quand et comment adapter chaque approche, sur la qualité de la relation thérapeutique et sur l’implémentation en vie réelle.

Conséquences potentielles pour le terrain

Risques juridiques et de périmètre

La formule « se réclamant de la psychanalyse » est susceptible d’englober des prises en charge pluri-référentielles où une part psychodynamique est intégrée (centres médico-psychologiques, hôpitaux de jour, pratiques libérales). La frontière avec des psychothérapies d’inspiration psychodynamique pourrait être litigieuse alors que ces dernières figurent dans l’arsenal de nombreuses équipes. Des directeurs d’établissements pourraient être contraints de revoir codages et procédures internes pour éviter les rejets.

Accès et équité des soins

Dans un système déjà sous tension, un déremboursement partiel ou total risque de renforcer les inégalités d’accès en santé mentale, avec un effet de renoncement aux soins pour les ménages modestes. Les arguments des sociétés savantes convergent : réserver certaines approches aux plus aisés reviendrait à fragiliser l’offre publique, notamment en pédopsychiatrie. [6]

Pour approfondir : panorama « santé mentale » de Caducee.net ; dégradation documentée de la santé mentale des soignants en 2025, contexte défavorable à toute réduction d’offre de soins. [12]

Où en est la procédure ?

Au 22 novembre 2025, l’amendement est inscrit dans la séquence des séances publiques du Sénat (19–26 novembre). Après l’examen en première lecture, la navette parlementaire pourra conduire à des modifications substantielles (sous-amendements, réécritures), voire à l’abandon de la mesure si elle ne recueille pas de majorité. [2]


Références

[1] Sénat – Amendement n°159 (PLFSS 2026) : texte et « objet ». 21 novembre 2025. lien

[2] Sénat – Dossier législatif PLFSS 2026 (calendrier des séances publiques 19–26 novembre 2025). lien

[3] Public Sénat – « Budget de la sécurité sociale : un amendement déposé au Sénat vise à dérembourser les soins de psychanalyse ». Aglaée Marchand. 19–21 novembre 2025. lien

[4] Société Psychanalytique de Paris (SPP) – « Amendement 159 pour le déremboursement des soins inspirés de psychanalyse ». ~17–21 novembre 2025. lien

[5] Psychologues.org – « Amendement 159 : vers une psychothérapie d’État ? » (communiqué). novembre 2025. lien

[6] SFPEADA – Communiqué du 21 novembre 2025, « Concernant l’amendement sénatorial n°159 » : extraits cités. PDF : lien

[7] Leichsenring F. et al. The status of psychodynamic psychotherapy as an empirically supported treatment. World Psychiatry. 2023. lien

[8] Caselli I. et al. Short-term psychodynamic psychotherapy for depression — systematic review & meta-analysis. Psychiatry Research. 2023. lien

[9] Smith M.M. et al. Equivalence of psychodynamic therapy and CBT for depressive disorders — meta-analytic review. Journal of Clinical Psychology. 2024/2025 (online). lien

[10] Wienicke F.J. et al. Efficacy & moderators of short-term psychodynamic psychotherapy for depression — IPD meta-analysis. Clinical Psychology Review. 2023. lien

[11] Trotta A. et al. Psychodynamic psychotherapy for young people — systematic review. Frontiers in Psychology. 2024. lien

[12] Caducee.net – Santé mentale des soignants : une crise qui s’aggrave. 12 mai 2025. lien

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