Insuffisance cardiaque : nouvelle voie thérapeutique cellulaire

A la suite d’une attaque cardiaque, des millions de cellules qui assuraient la fonction contractile du cœur sont détruites. En transplantant des cellules souches embryonnaires dans des cœurs post-infarctus de rat, une équipe de recherche du CNRS a réussi à orienter la différenciation des cellules vers une destinée cardiaque. L’expérience a montré une parfaite tolérance par l’animal hôte et une récupération de la fonction cardiaque. Bien que de nombreux travaux restent encore à faire, notamment sur les cellules souches embryonnaires humaines, ces résultats ouvrent une alternative à la greffe du myocarde, intervention chirurgicale lourde. L’expérience a été menée par l’équipe ? cellules ES et différenciation cardiaque ? sous la conduite de Michel Pucéat, au sein du ? Centre de recherches de biochimie macromoléculaire ? en collaboration avec l’équipe de André Terzic à la Clinique MAYO3 (Minnesota, Etats Unis).

L’insuffisance cardiaque est une des conséquences de nombreuses attaques cardiaques (infarctus du myocarde, hypertension artérielle, augmentation du taux de cholestérol sanguin, cardiomyopathies…). Elle touche des milliers de Français et pèse très lourd dans le taux de mortalité. 176 000 personnes meurent chaque année de maladies cardiovasculaires en France4. Faute de thérapie médicamenteuse satisfaisante, cette pathologie conduit le plus souvent à une greffe cardiaque. Or les greffes représentent une chirurgie lourde pour le patient, nécessitent un traitement anti-rejet contraignant et présentent des effets secondaires dangereux à long terme. De plus, tous les patients (diabétiques par exemple) ne peuvent être candidats à une greffe. Enfin le nombre de donneurs reste assez limité et ne peut faire face à la demande actuelle de greffes dans notre pays.

Le cœur est composé d’environ deux milliards de cellules qui chacune, constitue une unité contractile. Ces cellules se contractent toutes ensemble, assurant ainsi la fonction de pompe cardiaque. Au cours de l’infarctus, des millions de cellules sont perdues, or le cœur est un organe non doté de capacité de régénération. La perte de travail mécanique du myocarde qui en résulte est responsable de l’insuffisance qui se développe au cours des années après l’infarctus. La greffe de cellules souches embryonnaires, qui ont la potentialité de générer tous les tissus, et dont la destinée pourrait être prédéterminée peut ainsi remplacer les zones détruites au cours d’une attaque cardiaque.

Une nouvelle voie de thérapie dite ? cellulaire ?

Les chercheurs viennent de découvrir chez l’animal que le myocarde constitue un terrain favorable à la transplantation de cellules souches embryonnaires qui, en se différenciant spontanément en cellules cardiaques, permettent une récupération totale de la fonction mécanique. En utilisant des facteurs de différenciation naturellement présents dans le myocarde sain ou post-infarctus, ils ont montré qu’il était possible d’orienter la différenciation des cellules souches embryonnaires murines vers une destinée cardiaque. Transplantées in vivo dans un myocarde de rat en défaillance cardiaque suite à un infarctus expérimental, les cellules souches se différencient spontanément en cellules cardiaques. En bloquant expérimentalement in vitro et in vivo l’activation des récepteurs cellulaires de ces facteurs de différenciation, les cellules souches ne sont plus capables de se différencier mais au contraire prolifèrent à l’état non-différencié. Les chercheurs montrent ainsi que ces même facteurs de croissance endogènes sont responsables de la différenciation spontanée des cellules souches dans le myocarde.

La transplantation des cellules souches permet un repeuplement de la zone ischémiée (appauvrie en oxygène) et fibrotique du cœur post-infarctus et une récupération totale de la fonction mécanique (de pompe) du myocarde défaillant, sans aucun signe de rejet des cellules greffées. En effet les cellules souches n’ont pas été rejetées même huit mois après les greffes hétérologues , montrant une parfaite tolérance par l’animal hôte.

Bien que de nombreux travaux restent encore à faire notamment sur les cellules souches embryonnaires humaines, ces résultats ouvrent une réelle perspective pour une thérapie cellulaire de l’insuffisance cardiaque chez l’homme. Ces travaux financés par l’Association Française contre les Myopathies et la Fondation de France ont été publiés le 1er octobre 2002 dans FASEB Journal (volume 16 p 1558-1566), le journal de la Fédération des sociétés américaines de biologie expérimentale (Stem cell differentiation requires a paracrine pathway in the heart par Atta Behfar, Leonid V. Zingman, Denice M. Hodgson, Jean-Michel Rauzier, Garvan C. Kane, André Terzic, Michel Pucéat).

1 ES pour embryonnaire souche

2 Le Centre de recherches de biochimie macromoléculaire dirigé par Marcel DOREE a été créé en 1998 et regroupe 96 personnes, dont 41 chercheurs statutaires (CNRS, INSERM, Université) à Montpellier. Ses activités de recherche s'ouvrent sur la société nationale par des relations contractuelles et de partenariat avec des organismes publics et privés.

3 La clinique MAYO est un des plus grands centres de clinique associée à la recherche des Etats-Unis, n°1 en cardiologie.

4 Source INSERM 2000

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