Suppression de l'AME: Une décision controversée du Sénat

Suppression de l’AME: Une décision controversée du Sénat Le Sénat a récemment voté en faveur de la suppression de l'Aide Médicale d'État (AME), qui offrait une couverture médicale aux étrangers en situation irrégulière. Cette décision, qui s'inscrit dans le cadre du projet de loi sur l'immigration, a suscité de vives réactions et de nombreux débats.

Contexte de l'AME

L'AME est un dispositif créé en 1999 qui vise à fournir un accès aux soins aux étrangers en situation irrégulière sur le territoire français. Pour en bénéficier, une personne doit résider en France depuis au moins trois mois et avoir des ressources inférieures à un certain seuil.

L'AME représente 0,5 % du budget de la sécurité sociale et couvre une gamme de soins allant des maladies graves aux soins préventifs. Cependant, ce dispositif est régulièrement critiqué pour son coût, estimé à 1,14 milliard d'euros en 2023.

La suppression de l'AME par le Sénat

La suppression de l'AME a été adoptée par le Sénat le 7 novembre 2023. Cette mesure, introduite par la droite sénatoriale, prévoit le remplacement de l'AME par une Aide Médicale d'Urgence (AMU). L'AMU se concentrerait sur le traitement des maladies graves, des douleurs aiguës, des soins liés à la grossesse, des vaccinations et des examens de médecine préventive.

La droite justifie cette décision par les risques d'"appel d'air" que représente l'AME, ainsi que par son coût. Toutefois, cette proposition a été votée contre l'avis de plusieurs groupes du Sénat, qui ont mis en avant des arguments éthiques, économiques et sanitaires.

3500 médecins promettent la désobéissance

La suppression de l'AME a suscité de vives réactions. De nombreux sénateurs ont souligné les risques sanitaires et économiques de cette décision. Ils ont fait valoir que les pathologies prises en charge tardivement sont plus coûteuses pour le système de santé. Ils ont également souligné le risque sanitaire que représente le fait de ne pas soigner les étrangers en situation irrégulière, notamment en termes de propagation de maladies.

3500 médecins, tant salariés qu'exerçant en libéral, ont averti qu'ils continueront de prodiguer des soins aux sans-papiers même en cas de suppression de l'AME. Ces professionnels de santé ont signé une "déclaration de désobéissance" transmise à l’AFP dans laquelle ils affirment, conformément au Serment d'Hippocrate, qu'ils traiteront gratuitement les patients sans papiers selon leurs besoins. Cette déclaration a été initiée par les psychiatres Antoine Pelissolo et Jean-Marc Baleyte, chefs de service dans les hôpitaux Henri Mondor de Créteil et le CHI de Créteil. Ils s'engagent à ne pas tenir compte des conditions sociales, financières, de la langue ou de la nationalité des patients, soulignant que la déontologie médicale exige de fournir les soins appropriés à toute personne les consultant.

Le Professeur Pelissolo souligne que de nombreux médecins libéraux, généralistes ou spécialistes, ont adhéré à cette initiative. Pour eux, soigner un patient non couvert signifie ne pas recevoir de rémunération, marquant ainsi une position ferme. Dans les hôpitaux, cette démarche constitue une forme de désobéissance, les médecins pouvant choisir de ne pas déclarer une consultation ou de prendre en charge les frais d'hospitalisation.

Le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, a exprimé sa compréhension de cette situation, tout en affirmant que le gouvernement s'efforcerait d'éviter une désobéissance civile de la part des médecins. Il a souligné l'importance de l'AME comme dispositif de santé publique, rejetant l'idée de la transformer en une simple aide d'urgence. Parmi les autres signataires de cette déclaration, on retrouve des personnalités telles que l'urgentiste Patrick Pelloux, Julie Chastang, vice-présidente du Collège de médecine générale, et le néphro-pédiatre Rémi Salomon. Une tribune signée par environ 3000 soignants, dont des médecins et des professions paramédicales, avait déjà été publiée la semaine dernière dans le Monde, appelant à maintenir l'AME.

Le gouvernement et l'AME

La position du gouvernement face à la suppression de l'AME n'est pas claire. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, s'est exprimé en faveur de l'AMU, tandis que le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, s'y est opposé. Par ailleurs, la Première ministre, Élisabeth Borne, a commandé un rapport pour déterminer si des adaptations de l'AME sont nécessaires.

Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé, a défendu l'AME, affirmant que le "gouvernement est attaché" à ce dispositif. Toutefois, elle n'a pas donné d'avis favorable sur les amendements de suppression de cette mesure, s'en remettant à la "sagesse du Sénat".

Quelle suite pour l'AME ?

Malgré son adoption au Sénat, la suppression de l'AME a peu de chances d'être adoptée à l'Assemblée nationale, où une partie de la majorité présidentielle et toute la gauche y sont défavorables.

En attendant, les professionnels de santé et les organisations de défense des droits de l'homme restent mobilisés pour défendre l'AME et les droits des étrangers en situation irrégulière en France.

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