Parodontologie : une avancée en génétique

Une équipe internationale annonce avoir identifié le gène de la maladie de Papillon-Lefèvre, une affection à transmission autosomique récessive qui se manifeste chez la plupart des malades par une kératodermie palmo-plantaire associée à une parodontite. Cette découverte génétique, couplée à d'autres avancées en biochimie, permet d’espérer dans un proche avenir des innovations en matière de prévention, de diagnostic et de traitement des parodontites.

Décrite par des Français en 1924, cette maladie rare se traduit par une chute des dents de lait à l’âge de 4 ans et la perte de la plupart des dents définitives vers 14 ans. Variable en intensité, l’hyperkératose palmo-plantaire se développe habituellement au cours des trois premières années de vie. L’hyperkératose intéresse également d’autres sites, comme les coudes et les genoux. Certains patients ne présentent qu’une hyperkératose palmo-plantaire ou une parodontite.

Dirigée par Carmel Toomes et coll. de l’Université de Manchester, Grande-Bretagne), cette équipe a travaillé en collaboration avec des chercheurs des Universités de Belfast et Leeds (Royaume-Uni), de Nouvelle Galles du Sud à Westmead (Australie) et du Caire (Egypte).

Ces généticiens, pédiatres, dentistes et immunologistes ont étudié 8 familles comptant des enfants atteints par la maladie de Papillon-Lefèvre. Leurs travaux ont porté sur trois familles égyptiennes et trois familles indo-pakistanaises avec consanguinité et deux familles libanaises sans consanguinité connue.

Le locus responsable de cette affection a récemment été localisé sur le bras long du chromosome 11 (11q14-q21). L’analyse génétique a permis à l’équipe internationale de mieux délimiter la région candidate et de remarquer que le gène codant pour la cathepsine C se trouve dans cet intervalle.

Les chercheurs rapportent dans la revue Nature Genetics avoir identifié la présence de mutations homozygotes dans le gène codant pour la cathepsine C, une protéase lysosomale, chez tous les patients souffrant de la maladie de Papillon-Lefèvre dans ces 8 familles. Ces mutations entraînent une perte de fonction de la protéine.

Exprimée dans de nombreux types cellulaires, la cathepsine C participe à la maturation et à l’activation d’enzymes (sérine-protéases) qui ont un rôle essentiel dans les réponses immunes et inflammatoires des cellules myéloïdes et lymphoïdes. Elle exerce notamment son action sur les granzymes A et B, des sérine-protéases sécrétées par les lymphocytes T cytotoxiques et les cellules natural killer pour détruire leurs cibles : cellules tumorales ou infectées.

Au total, on pense que les principales fonctions de la cathepsine C sont la dégradation de protéines et l’activation de proenzymes.

Les données aujourd'hui publiées contribuent à faire jouer à la cathepsine C un rôle essentiel dans l’établissement et le maintien de l’organisation structurale de l’épithélium des extrémités (paumes, plantes), de même que dans l’intégrité des propriétés immunologiques des tissus de soutien des dents.

Selon Glen Nuckolis et Harold Slavkin du National Institute of Dental and Craniofacial Research (NIH, Bethesda, Etats-Unis) qui signent un éditorial accompagnant l’article, bien que la maladie de Papillon-Lefèvre soit rare, des études doivent être menées pour savoir si la cathepsine C et d’autres composants de sa voie métabolique interviennent dans des formes plus courantes de parodontites.

" Il existe peut-être, ajoutent-ils, une corrélation entre la parodontite d’apparition tardive et d’autres mutations ou polymorphismes du gène de la cathepsine C, de la même façon que des polymorphismes dans le gène de l’IL-1 sont associés à une production accrue d’interleukine-1 et à une plus grande susceptibilité à la parodondite sévère chez l’adulte ".

" Des études génétiques, moléculaires, biochimiques et structurales sur la cathepsine C, l’IL-1 bêta et les produits d’autres gènes liés aux parodontites pourraient révolutionner la prise en charge de cette maladie chronique ", concluent-ils.

Nature Genetics, Vol.23, décembre 1999, 421-4 et 378-9.

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