Souffrance au travail : 50% des professionnels de santé en situation de Burnout

Près de 6 milliards de dollars de levée de fonds pour  la e-santé en 2015. Quelques semaines seulement après le suicide du Pr Jean-Louis Megnien, cardiologue à l'hôpital Georges Pompidou et l'enquête ouverte pour harcèlement moral à l'AP-HP, le débat sur la souffrance au travail des professionnels de santé est relancé par la récente enquête menée par Stéthos International auprès de 1905 professionnels de santé. Selon ses résultats, près de la moitié des professionnels de santé estiment avoir été en situation de Burnout en 2015 et 14% ont été concernés par des conduites addictives. Ils sont 80% à souhaiter être pris en charge dans un centre qui leur est spécifiquement réservé, de préférence éloigné de leur lieu d'exercice.

Selon les enseignements tirés lors du colloque organisé sur ce thème début décembre, les souffrances des professionnels de santé se traduisent le plus souvent par un syndrome d'épuisement (burnout), des addictions et aussi trop souvent par un suicide. Elles sont la conséquence d’un mal-être ou d’une névrose, sont liées à la difficulté à assumer ses limites et touchent plus ceux qui prennent en charge la vulnérabilité humaine. Fait nouveau, le burnout serait surtout dû à la pesanteur croissante des contraintes administratives et socio-économiques, ce qui pourrait encore aiguiser le débat sur le tiers-payant généralisé. Le burnout ne serait pas l'apanage du secteur hospitalier puisque sur les 1905 répondants, 1383 sont des médecins issus majoritairement du secteur libéral.

Les professionnels de santé ne sont pas immunisés contre les addictions. Peu d'études sont disponibles sur le sujet, surtout en France où l'on pourrait presque parler de tabou. D'après l'Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies, on sait que 10 à 12% des médecins seraient concernés par les conduites addictives. La consommation d'alcool est la plus courante (la moitié des cas) mais celle de psychotropes, d'opiacés et de stimulants est également relativement répandue. La polyconsommation est fréquente. L’anesthésiologie, la médecine d’urgence, la psychiatrie seraient les spécialités les plus concernées. L'enquête Stéthos donne d'ailleurs des résultats similaires avec 7% des professionnels de santé concernés par la dépendance à l’alcool et 8,5% par les psychotropes ou aux anxiolytiques.


Si comme dans la population générale, des facteurs personnels ou familiaux peuvent expliquer ces conduites, l'environnement professionnel joue souvent un rôle important. Les symptômes sont d'autant moins repérés que l’exercice est isolé. Les troubles restent donc longtemps non diagnostiqués et non abordés, leurs patients potentiellement en danger. Par ailleurs, la difficulté des soignants à se positionner comme patient face à une autre soignant retarde encore la prise en charge. Pour ces raisons, la mise en place d’actions de prévention spécifiques et de programmes de soins adaptés est nécessaire.

C'est d'ailleurs ce que confirme les répondants de l'enquête Stéthos, puisqu'ils sont un quart seulement à se déclarer prêt à se soigner dans les mêmes structures que celles destinées à leurs patients. Ils sont en revanche 80% à préférer un centre dédié aux professionnels de santé, plutôt éloigné de leur lieu d'exercice.

Comme l’a rappelé Pierre CARAYON, professeur émérite de l’Université de Franche-Comté, « Nous sommes une profession à risque, non seulement pour elle-même mais plus encore pour les patients, avec ses spécificités. Pour ces raisons, j’insiste depuis toujours sur la nécessité de créer des structures dédiées pour une prise en soin parfaitement adaptée ».

LE MAL-ÊTRE CHEZ LES MÉDECINS GÉNÉRALISTES

• Plus d’1 généraliste sur 10 est en détresse psychologique, avec une variation située entre 10 et 17% selon les régions.
• 60% se déclarent menacés par l’épuisement professionnel.
• Au moins 30% sont frappés par l’un ou plusieurs des 3 aspects du burnout :
- épuisement émotionnel (43% des cas),
- baisse de l’accomplissement personnel (33%),
- dépersonnalisation (40%).
• 58% des internes présentent au moins l’un des 3 critères de burnout.
• Le sur-risque de suicide chez les médecins en activité est de 2,3.

Sources : Eric Galam, 2011 et 2007 ; Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES), 2010 ; European General Practice Resarch Network (EGPRN, réseau de recherche européen en médecine générale), 2008 ; Didier Truchot, 2006 ; Yves Leopold, 2003

 

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